Sécuriser l’héritage diamantaire du Botswana

Joshua Freedman

Le tourisme pourrait jouer un rôle essentiel dans l’avenir du pays, une fois l’extraction minière tarie, selon un dirigeant de Debswana.

Quel est le lien entre le prince Harry et Kim Kardashian ? Ils ont probablement un certain nombre de choses en commun, entre autres le fait qu’ils se soient tous deux rendus au Botswana.

En effet, le prince Harry a passé des vacances avec Meghan Markle dans ce pays d’Afrique australe, tandis que Kim Kardashian a visité la mine de diamants de Jwaneng. Le site n’est vraisemblablement pas l’endroit le plus glamour où la célébrité s’est rendue : Jwaneng, comme la plupart des mines de diamants, est un immense trou creusé dans le sol.

L’accueil des clients à la mine

Le Botswana, premier pays producteur de diamants en valeur au monde, pourrait toutefois bénéficier d’une meilleure opportunité. Pouvoir affirmer à un client qu’un diamant provient du Botswana – et expliquer l’importance de cette provenance – est une chose. Pouvoir lui vendre une excursion jusqu’à la mine afin qu’il choisisse lui-même un diamant brut, qu’il recevra quelques semaines plus tard sous forme de diamant taillé, serti sur une bague, en est une autre et il pourrait bien s’agir d’un argument de poids.

Cette option n’est pas encore accessible à tous. Les mines de diamants sont des lieux hautement sécurisés, dont l’accès est limité pour les personnes extérieures. Debswana, la joint-venture détenue à 50 % par De Beers et à 50 % par le gouvernement du Botswana, accueille les visiteurs au cas par cas.

« Nous avons mis en place une équipe qui reçoit les demandes ; ses membres peuvent se rendre à la mine pour assurer les visites », a déclaré Mpho Rebecca Mosate, responsable exécutive de la sécurité et du développement durable de la société, lors d’un entretien avec Rapaport News au salon JCK Las Vegas, au mois de juin. « Les clients peuvent ainsi se faire une idée du travail réalisé en termes d’impact social. »

Mpho Rebecca Mosate (Debswana)

Le prince Harry reste l’un des acheteurs les plus célèbres des diamants du Botswana. Il a demandé Meghan Markle en mariage en 2017 en lui offrant une bague dont la pierre centrale provenait du Botswana, pays où le couple avait passé des vacances. Aucune information n’a pu être obtenue sur la façon dont le prince s’est procuré le diamant (la bague a été réalisée par Cleave & Company, une société londonienne). (Debswana a retiré sa déclaration selon laquelle le prince s’était rendu à Jwaneng.)

Les projets de l’ère post-minière

La stratégie de Debswana dans ce domaine consiste principalement à restaurer les sites une fois l’extraction achevée. Le « tourisme du diamant » est une partie essentielle des projets de la société qui se prépare pour l’époque où les ressources seront épuisées. 

« Nous sommes conscients que les mines ne sont pas éternelles, contrairement à l’héritage des diamants, a expliqué Mpho Rebecca Mosate. L’écotourisme et le tourisme minier sont deux activités qui pourraient assurer des moyens de subsistance après la fermeture des mines. » 

Ce pays d’Afrique australe cherche à changer d’orientation, après l’exploitation minière qui domine son économie depuis des décennies. La diversification économique figurait dans les termes du contrat d’approvisionnement de juin 2023 avec De Beers. Les ralentissements de l’industrie ont un impact direct sur le Botswana, étant donné que le pays est dépendant des diamants.

Le pays n’atteindra probablement pas son objectif de croissance économique de 4,2 % cette année, a indiqué un responsable de la banque du Botswana au mois de mai, cité par Reuters. Cette annonce est consécutive à une faible demande de diamants dans le monde. 

Un potentiel inexploité

La magnificence de l’environnement naturel protégé du pays incite au tourisme. L’idée de faire un lien avec les diamants a déjà été évoquée.

Un document, publié en 2013 dans le Journal for Development and Leadership d’Afrique du Sud, intitulé « L’extraction des diamants, possible stratégie pour la diversification du tourisme au Botswana », préconisait la création d’un musée du diamant.

« Il reste un énorme potentiel inexploité de développement touristique lié à l’extraction minière, ont écrit les auteurs Delly Mahachi et Lisbon Simeon Ketshabile. Ce n’est pas normal, si l’on considère que le Botswana est le plus gros producteur de diamants en valeur au monde. »

Cinq ans plus tard, Debswana ouvrait un musée sur le site de sa mine Orapa, dans une région aux multiples richesses, outre ses diamants. À peu de distance de la mine se trouve l’Orapa Game Park et le parc national Pan de Makgadikgadi, une étendue de mares salées éparses, réputées auprès des amoureux des oiseaux. Plus au nord se trouvent le delta de l’Okavango et la réserve animalière de Moremi.

Le delta de l’Okavango (Shutterstock).

« L’idée est d’établir un parcours touristique allant du site minier jusque dans le Pan de Makgadikgadi, puis vers le nord, dans une région propice aux safaris », a déclaré Mpho Rebecca Mosate. 

Il reste encore à Jwaneng et Orapa, les structures phares de Debswana, des dizaines d’années de production, notamment grâce aux projets d’exploitation souterraine à Jwaneng. Toutefois, lorsqu’elles seront totalement épuisées, des questions se poseront en termes économiques et pour la préservation des lieux. Les nouvelles sources de revenus auront d’autant plus d’importance.

« L’option de base », une fois l’extraction arrêtée, consiste simplement à préserver les sites et à s’assurer qu’ils ne soient pas dangereux, a fait remarquer Mpho Rebecca Mosate. Il existe également une possibilité plus intéressante qui serait de transformer les mines elles-mêmes en attractions touristiques.

« Le sujet mérite que l’on s’y attarde : les visiteurs pourraient se rendre dans un grand puits, là où avait lieu l’extraction, ou dans un parc animalier et observer des animaux évoluant dans un espace précédemment utilisé pour l’extraction minière, puis réhabilité », a-t-elle affirmé. 

L’après Kimberley

Aucune mine du Botswana n’est encore arrivée à ce stade. Celles qui sont en situation d’entretien et de maintenance, comme Damtshaa, près d’Orapa, pourraient reprendre la production si cela était nécessaire. Le principal exemple, à l’extérieur du pays, est la mine Kimberley, en Afrique du Sud, surnommée Big Hole, où les touristes peuvent se rendre sous terre, dans un puits reconstitué. 

Des reconstitutions de boutiques au musée de la mine Big Hole à Kimberley, en Afrique du Sud (Shutterstock).

Une autre possibilité serait d’utiliser le site pour des activités « plus sportives », comme la tyrolienne et le saut à l’élastique, a souligné Mpho Rebecca Mosate.

« Toutes ces options méritent d’être étudiées afin de déterminer leur viabilité pour cette région géographique bien particulière », a-t-elle déclaré. 

Tant que la production n’est pas arrêtée, les « ultra-vacances du diamant » au Botswana – au cours desquelles les clients sélectionnent une pierre brute pour une bague de fiançailles – nécessiteraient une collaboration entre Debswana, les fabricants et les détaillants. Pour l’heure, elles risquent bien d’être réservées à des personnalités du rang du prince Harry. 

Correction du 27 juin 2024 : une version antérieure de cet article indiquait que le prince Harry avait visité la mine Jwaneng. Cette mention a été supprimée après une rétractation de Debswana.

Image principale : le prince Harry et Meghan Markle ; des girafes dans la savane du Botswana (Shutterstock).

Source Rapaport