La section 1502 de la loi Dodd-Frank, objet de nombreuses controverses, risque d’être affaiblie par la nouvelle administration.[:]
Tout comme la gestion des diamants du conflit et du Kimberley Process par la nouvelle administration est source de nombreuses incertitudes, le destin de la section 1502 de la loi Dodd-Frank (« Wall Street reform and consumer protection act ») apparaît très flou.
Cette disposition, glissée dans les textes à la dernière minute, oblige les sociétés cotées à publier les procédures mises en place pour que les « minéraux du conflit » n’alimentent pas la guerre civile en République démocratique du Congo. Dans l’industrie de la joaillerie, les sociétés cotées ont ainsi dû déclarer publiquement leurs procédures relatives à l’approvisionnement de l’or et du tungstène.
Le 3 février, le président Donald Trump devait signer un décret qui amoindrirait certains aspects de la Loi Dodd-Frank. On ne sait pas encore si la Section 1502 en fera partie. Toutefois, au cours de la semaine du 30 janvier, le président en poste de la Securities and Exchange Commission, Michael S. Piwowar, a affirmé qu’il pourrait réviser les directives de son agence sur cette disposition – et même s’il ne l’édulcore pas, son probable successeur, l’avocat de Wall Street Jay Clayton, le fera probablement. Pourtant, même ainsi, les experts considèrent que les sociétés ne seront pas exemptées de leur obligation de rapport pour cette année.
La section 1502 a fait l’objet de procès sans fin et d’une importante controverse. Beaucoup ont considéré que la SEC ne devait pas gérer une question portant essentiellement sur la politique étrangère et de nombreuses preuves montrent qu’elle a nui à la RDC autant qu’elle l’a aidée.
Pourtant, la disposition est officiellement entrée en vigueur il y a trois ans et les sociétés ont consacré beaucoup de temps et d’énergie et dépensé beaucoup d’argent pour tenter de s’y conformer. Signet, par exemple, a relevé le défi de la loi Dodd-Frank, à savoir développer un programme d’approvisionnement en or, lequel a donné naissance à son programme d’approvisionnement des diamants. Richline affirme avoir amélioré sa chaîne d’approvisionnement grâce au règlement. D’autres sociétés sont moins avancées mais Signet et Richline sont des sociétés d’une telle ampleur que leurs initiatives se sont répercutées sur toute l’industrie.
Jeudi 2 février, Cecilia Gardner, présidente et PDG du Jewelers Vigilance Committee, m’a indiqué qu’en matière d’approvisionnement responsable, « le train est déjà passé. » Les sociétés actuelles, a-t-elle expliqué, admettent qu’il est logique commercialement de se comporter de façon éthique. Cela est particulièrement vrai pour l’industrie de la joaillerie qui a pâti d’être associée aux conflits. C’est ce que veulent les consommateurs d’aujourd’hui. C’est aussi ce que veulent les banques. Et même si le gouvernement fédéral accorde moins d’attention à ces questions, les États pourraient venir combler les lacunes. Ainsi, le Massachusetts par exemple vient de signer une nouvelle loi sur les minéraux du conflit.
Dans le meilleur des cas, la section 1502 obligeait les sociétés à accroître la transparence de leur chaîne d’approvisionnement. Aujourd’hui qu’elles se sont pliées à ces directives, elles n’ont que peu d’intérêt à revenir en arrière. Cela signifie que, malgré tous les défauts de cette disposition, elle a peut-être atteint une partie de ses objectifs les plus importants. Alors, qu’elle soit abrogée ou non, affaiblie ou non, dans une large mesure, le train 1502 est en effet déjà bien loin.