Au cours de la semaine du 22 septembre, l’industrie s’est pris deux coups durs, en plein dans le bilan comptable. Tout d’abord, la Banque Diamantaire Anversoise a annoncé qu’elle fermerait ses portes.[:] Au terme de quatre années de frustrations, qui n’auront jamais porté leurs fruits, son propriétaire, KBC, renonce à chercher un repreneur convenable. Il avait bien trouvé un acheteur supposé, le groupe Yinren, mais les doutes n’ont jamais été levés sur la capacité de la société immobilière shanghaienne à gérer une banque, même si l’accord comprenait une subvention généreuse de KBC. Après six mois d’un comportement énigmatique, Yinren s’est vraisemblablement retiré en plein milieu des négociations.
Dans la foulée, la presse indienne a annoncé que la division diamantaire de Standard Chartered – qui souffrait déjà de l’absence de sa fondatrice Anna Martin, et qui a laissé entendre qu’elle n’accepterait plus de nouveaux clients – allait prendre du recul par rapport aux entreprises indiennes. (SC a refusé de commenter.)
[MISE À JOUR : e-mail de Standard Chartered : « Standard Chartered ne quitte pas le secteur diamantaire et joaillier… Nous passons constamment en revue notre portefeuille de clients afin d’évaluer les risques de manière proactive. »]
De nombreuses banques ont soit drastiquement limité les frais, soit purement et simplement tourné le dos à l’industrie. Je pense notamment à Bank Leumi, Sovereign et JPMorgan Chase. D’autres ont considérablement durci leurs conditions. Nous sommes de toute évidence au bord de la crise.
Le secteur est toujours en train de digérer les tenants et les aboutissants de ces nouvelles, mais cela pourrait être assez grave. « Nous avons ouvert la boîte de Pandore, s’inquiète Pankaj Parekh, vice-président du Conseil du Gem and Jewellery Export Promotion Council. Les prix du brut pourraient connaître une chute sévère. Les exportations indiennes pourraient diminuer, ce qui engendrerait une pénurie sur les marchandises très demandées. Il pourrait même y avoir quelques cas de faillites. » Howard Davies, responsable du développement commercial de la De Beers, employant quelques euphémismes bien choisis, a déclaré lors d’un forum bancaire organisé le 1er octobre, que le manque de financements disponibles pourrait « favoriser la consolidation sur le secteur intermédiaire ».
Alors, avec des bases aussi solides pour l’offre et la demande, pourquoi l’industrie est-elle confrontée à de telles difficultés ? Un banquier a énoncé clairement les problèmes : « évasion fiscale, incapacité de respecter Bâle III, incapacité à fournir des états financiers audités, problèmes avec le Kimberley Process, problèmes sociopolitiques, et la liste est encore longue. »
Les banques, et plus particulièrement Standard Chartered – sanctionnée au mois d’août par l’État de New York pour ne pas avoir mis en place de véritables contrôles sur ses agences de Hong Kong et Dubaï –, cherchent à se « dérisquifier » et préfèrent éviter les clients qui pourraient les mettre dans la panade. Que cela soit juste ou non, l’industrie diamantaire leur apparaît comme un possible écueil.
Il est évident qu’il s’agit là d’une réaction quelque peu excessive. La plupart des entreprises diamantaires sont solvables et honnêtes. Mais le secteur a aussi rechigné à faire des efforts qui lui auraient permis, tout comme à sa chaîne d’approvisionnement, de faire preuve de davantage de transparence. Lorsque j’ai présidé une séance sur le Diamond Source Warranty Protocol au salon JCK de Las Vegas il y a deux ans, l’une des approbations les plus enthousiastes venait d’un banquier dans le public. Des procédés comme la chaîne de contrôle des diamants du Responsible Jewellery Council, réclamée à cor et à cri par les gouvernements et les ONG, n’auraient pas résolu tous les problèmes de l’industrie en ce qui concerne les banques. Ils auraient pourtant permis de prouver une bonne volonté très attendue en matière de transparence. Si l’industrie ignore les demandes et les normes du monde extérieur, qu’elle ne s’étonne pas qu’il la prenne à partie.