À l’instar de l’économie mondiale, le marché des bijoux et des diamants laisse filtrer des messages mitigés avant la saison des fêtes.[:] L’idée prédominante, selon laquelle les perspectives économiques sont les plus solides depuis la crise de 2008, est mise à mal par la volatilité du marché, les facteurs géopolitiques, les fluctuations des devises, un apparent ralentissement en Chine et une prudence globale sur le marché du luxe. Parallèlement, le secteur des diamants et des bijoux s’essouffle dans le segment haut-de-gamme et bascule vers des articles plus abordables, de qualité inférieure.
Pourtant, beaucoup considèrent que, pour la première fois depuis bien longtemps, la situation des principaux marchés de consommation pourrait, cette année, assurer une demande stable pour les bijoux en diamants, offrant des perspectives positives pour le quatrième trimestre.
Les États-Unis ont gagné de la vitesse grâce à l’argent qui a continué d’être injecté dans l’économie, les faibles taux d’intérêt ayant encouragé les investissements et les dépenses de consommation. Les richesses se sont concentrées au Moyen-Orient, à mesure que l’argent affluait de pays en difficultés vers des centres comme Dubaï. Cela a d’ailleurs permis une hausse des dépenses de consommation aux Émirats. La Chine a connu une certaine amélioration après une année 2013 difficile, au cours de laquelle le pays s’est adapté à ses nouveaux dirigeants. L’Inde a également surmonté une année 2013 compliquée. L’élection du gouvernement de Narendra Modi cette année a restauré la confiance. Le sentiment que la crise était dépassée a même atteint l’Europe.
Peut-être 2013 a-t-elle été une année particulièrement délicate, contrastant avec les tendances positives de 2014. Mais les événements de ces dernières semaines ont ébranlé la confiance du marché.
Pour commencer, les différentes économies de la zone euro restent incertaines. Les économistes s’attendent notamment à ce que l’Allemagne – depuis longtemps le pilier de la région – recule pour le deuxième trimestre consécutif, ce qui, techniquement, entraînerait le pays en récession, les exportations ayant reculé ces derniers mois. Au troisième trimestre, l’économie chinoise a progressé de 7,3 %, le taux le plus bas depuis plus de cinq ans, sur fond de suspicions d’un gonflement des niveaux des dettes d’entreprise. Au Japon, le gouvernement a récemment déclassé sa propre évaluation de l’économie, les sociétés ayant réduit leur production en raison d’un repli de la consommation.
Les marchés se montrent par ailleurs plus nerveux, craignant que la Réserve fédérale ne mette bientôt fin à son programme d’assouplissement quantitatif et ne commence à relever ses taux d’intérêt – une décision qui toucherait à la richesse des investisseurs et aux niveaux de consommation. Ajoutez à cela le virus Ébola, l’État islamique, la crise en Russie et les manifestations à Hong Kong, et vous obtenez une incertitude globale bien compréhensible.
[two_third]D’après Bain & Company, ces facteurs ont pesé sur la croissance du secteur du luxe. Le groupe a affirmé ce mois-ci, dans son étude annuelle pour 2014 sur le luxe mondial, que ce marché s’est installé dans une croissance plus lente, mais plus durable. Les chercheurs prévoient que le marché mondial du luxe progresse de 5 %, à 281,2 milliards de dollars (223 milliards d’euros) en 2014, en baisse par rapport à la croissance de 7 % enregistrée en 2013. [/two_third][one_third_last]
« [Le marché du luxe] s’est installé dans une croissance plus lente, mais plus durable. »
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Signe de l’incertitude des temps, Bain a expliqué que de nombreux consommateurs recherchent un meilleur rapport qualité/prix lors de leurs achats de luxe. Selon l’étude, les clients plus âgés limitent leurs budgets pour les articles de luxe et se cantonnent à des marques accessibles, tandis que les consommateurs ambitieux, aux revenus moyens, ont préféré les marques premium et le marché de l’occasion.
« Nous constatons une forte polarisation sur les marques de luxe, ainsi que la croissance rapide d’un segment « d’alternative au luxe ». Les marques premium tentent de se hisser à la hauteur des marques de luxe et mettent en avant un statut qui dépasse la gamme de leurs produits », a expliqué Claudia D’Arpizio, associée chez Bain, qui a aidé à rédiger l’étude. « Récemment, nous avons également assisté à un lifting du marché de l’occasion, boosté par la révolution sur Internet. Et même si ce secteur menace les ventes de produits neufs, il transforme en même temps les articles de luxe en biens durables, au prix de revente de mieux en mieux défini, ce qui augmente leur valeur. »
Des tendances de même ordre sont apparues sur le marché du diamant, face aux souhaits des consommateurs. La demande a ralenti pour les diamants de qualité supérieure sur le segment haut-de-gamme, comme les pierres de couleur D à F et de pureté IF à VVS, tandis que celle pour les pierres de qualité commerciale reste constante. Cette tendance montre que les consommateurs des franges supérieures recherchent de la valeur lors de leurs achats de bijoux de prix et témoigne de l’essor des consommateurs aux revenus moyens, qui achètent généralement des bijoux en diamants plus abordables.
L’industrie mondiale du diamant est soutenue – en particulier au cours des périodes de volatilité – par la croissance constante du segment des revenus moyens, notamment dans les économies émergentes comme la Chine et l’Inde, et par la stabilité des consommateurs américains dans ce même groupe de population.
Lorsque les messages mitigés envoyés par l’économie mondiale et le marché de la joaillerie sont bien compris, les tendances économiques et géopolitiques négatives engendrent généralement de la prudence sur le segment haut-de-gamme. Parallèlement, la croissance économique qui domine implique que davantage de personnes dans le monde peuvent se permettre d’acheter des diamants et en ont envie, même si les niveaux de prix sont plus bas. Comme dans le marché du luxe d’occasion, aujourd’hui revisité, les diamants de qualité inférieure tentent de se hisser à la hauteur du segment haut-de-gamme, en devenant accessibles au plus grand nombre.
[two_third]L’industrie diamantaire est devenue un marché à deux niveaux, qui dessert aussi bien les consommateurs du luxe, plutôt exclusifs, que les personnes aux revenus moyens. Et même si le marché haut-de-gamme va inévitablement rebondir, le secteur s’appuie actuellement sur la croissance d’une classe moyenne au niveau mondial. Ce point est encourageant pour le marché : il signifie que la croissance sera soutenue, même en cas de volatilité et de recul de l’économie, et ce tant que les diamants conserveront leur attrait émotionnel et évocateur.[/two_third][one_third_last]
« La croissance sera soutenue tant que les diamants conserveront leur attrait émotionnel et évocateur. »
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Les prévisions de croissance pour la demande de diamants et de bijoux restent donc positives pour la fin de l’année 2014, malgré la prudence qui a caractérisé l’économie mondiale ces dernières semaines.