Le marché diamantaire a débuté l’année de façon positive, avant que la pandémie de Covid-19 ne vienne semer le trouble début mars.
La demande de diamants avait rebondi en août dernier, grâce à un retail stable pour les bijoux en diamants aux États-Unis et en Chine.
Paul Zimnisky, expert de l’industrie, a déclaré à Mathew Nyaungwa, de Rough&Polished, que la tendance positive pouvait également être attribuée à la demande pour les fêtes qui s’est propagée tout au long de la chaîne d’approvisionnement, associée au fait que de nombreux fabricants manquent de stocks en raison de la pandémie et des difficultés associées dans la chaîne d’approvisionnement.
Il a déclaré que, même si la pandémie a pesé sur la demande pendant la majeure partie de l’année 2020, en ce qui concerne les achats de cette période de fêtes, les diamants, les bijoux et autres articles de luxe matériels pourraient bien obtenir des résultats supérieurs. En effet, les consommateurs ne devraient pas offrir autant de cadeaux sous forme d’expériences que ces dernières années.
Note : Paul Zimnisky a lancé un podcast intitulé Paul Zimnisky Diamond Analytics, qui offre un aperçu de l’industrie diamantaire internationale, chaque épisode étant enregistré avec un invité en vedette.
Voici quelques extraits de l’entretien.
Quelle a été la situation du marché du brut en 2020 ?
Après un premier semestre évidemment très difficile, nous avons constaté une tendance positive, grâce à l’amélioration de la demande de brut, observée pour la première fois en août et qui s’est poursuivie jusqu’en novembre. Ainsi, par exemple, les grands miniers ont vu leurs ventes de brut perdre de 80 % à 90 % en glissement annuel entre mars et juillet. Or, d’août à octobre, ALROSA notamment a vu ses ventes s’améliorer considérablement, de 20 % à 30 % par rapport à la même période l’année dernière. Plus récemment, en novembre, les ventes de De Beers ont pris plus de 10 % en glissement annuel. Selon moi, la tendance positive est attribuable à la demande pour les fêtes qui s’est propagée dans la chaîne d’approvisionnement, en plus du fait que de nombreux fabricants manquent de stocks en raison de la pandémie et des difficultés associées dans la chaîne d’approvisionnement.
Certains producteurs annoncent désormais une reprise stable du marché du brut, après les perturbations provoquées par la pandémie de Covid-19. Est-il encore trop tôt pour se réjouir, étant donné la deuxième vague de la pandémie dans certaines grandes économies ?
Je pense que les membres de cette industrie, ainsi que ceux qui suivent son actualité, affichent désormais des attentes bien plus prudentes. Ces dernières années, nous avons observé les conséquences de pratiques commerciales trop optimistes. Je pense que l’industrie adopte actuellement des attentes bien plus raisonnables. Quelle joie si l’industrie faisait des promesses tièdes et délivrait des résultats exceptionnels à ses parties prenantes !
Quelles sont vos attentes pour les marchés du brut et du taillé alors que l’année touche à sa fin, étant donné la résurgence de la Covid-19 ?
À court terme, je pense que la clé sera dans la demande effective pour les fêtes, plus précisément Noël et le Nouvel An chinois. Certes, la pandémie a bien entendu pesé sur la demande pendant la majeure partie de l’année 2020, mais en ce qui concerne les achats pour les fêtes, les diamants, les bijoux et autres articles de luxe matériels pourraient en fait obtenir des résultats supérieurs car les consommateurs ne devraient pas offrir autant de « cartes-cadeaux pour des expériences » que ces dernières années. À moyen terme, cette industrie, comme beaucoup d’autres, sera sensible à la disponibilité d’un vaccin. Ici aux États-Unis, il semble que les premiers vaccins seront disponibles avant la fin de l’année 2020. Au départ, les disponibilités seront certainement limitées aux professionnels de la santé et aux personnes les plus à risque. Mais il s’agira d’une première étape très importante qui apportera un peu de confiance. Espérons qu’à la même époque l’année prochaine, les vaccins seront largement disponibles partout dans le monde.
Quels ont été les résultats pour les diamants synthétiques cette année ?
D’après ce que j’ai pu voir, il n’y a pas eu de grandes avancées dans la demande des diamants synthétiques ces derniers mois. L’offre a été quelque peu perturbée en raison de la pandémie, comme nous l’avons vu pour de nombreux autres produits. En revanche, les débats sur les diamants synthétiques semblent s’être un peu apaisés cette année par rapport à 2018 et 2019. Plus récemment, De Beers a élargi sa nouvelle installation de fabrication Lightbox aux États-Unis fin octobre, ce qui lui permettra d’accélérer considérablement la production et la distribution de ses diamants synthétiques. La société a également récemment conclu un accord avec le principal vendeur de diamants en ligne, Blue Nile, afin de distribuer ses diamants Lightbox uniquement comme bijoux de mode. Selon moi, c’est la nouvelle la plus importante dans le monde des diamants synthétiques cette année.
Quelle est la part de marché des diamants synthétiques par rapport à celle des diamants naturels ?
Je pense qu’elle représente moins de 10 % du marché mondial des bijoux en diamants. Je pense toujours que ce secteur va se développer mais plus sûrement en tant que bijoux de mode, davantage qu’en tant que joaillerie.
Quels sont les pays qui enregistrent une croissance de la demande des diamants synthétiques et qu’est-ce qui stimule cette croissance ?
Il y a quelques années à peine, le marché de consommation pour ce produit était presque entièrement basé aux États-Unis. Cela est dû au fait que les États-Unis sont le plus gros marché mondial pour les bijoux en diamants, avec jusqu’à 50 % du marché. Les sociétés de diamants synthétiques ont donc commencé à commercialiser leurs marchandises dans ce pays. Aujourd’hui, le produit est davantage présent à l’échelle mondiale. L’accord de Lightbox dont je parlais augmentera encore la portée du produit puisque Blue Nile dispose d’un système de distribution véritablement international, desservant plus de 40 pays.
Certains analystes ont attribué le recul des achats de diamants naturels à la fin de la campagne marketing historique de De Beers. Qu’en pensez-vous ?
Je crois effectivement qu’un marketing générique comme celui-ci a eu un effet important sur la demande mondiale de bijoux en diamants. Alors oui, je suis tout à fait d’accord avec cette idée. Bien entendu, je considère que ce que fait actuellement le Natural Diamond Council est très important pour l’industrie. À mon avis, ils ont réalisé des progrès majeurs cette année en dirigeant cette campagne. J’aimerais toutefois qu’ils profitent d’un budget plus conséquent. S’ils disposaient du double ou du triple de ce qu’ils ont actuellement en termes de budget, je serais bien plus enthousiaste sur l’avenir de l’industrie des diamants naturels.
Quel est le niveau de la demande prévu pour les bijoux en diamants avant la saison des fêtes et quel est le type de bijoux en diamants qui entraîne le marché ?
D’après ce que je constate, les clients veulent quelque chose d’unique pour leurs bijoux en diamants. Il peut s’agir du design du bijou en lui-même, de l’origine du diamant ou d’une histoire personnelle associée au bijou. Ils veulent aussi une personnalisation, ils veulent quelque chose d’authentique et de transparent. Toutefois, les bijoux de marque continuent d’obtenir de bons résultats. Tiffany a récemment noté un accueil très enthousiaste pour sa gamme T1, une nouvelle collection en or et diamants, et Cartier a déclaré que sa gamme Juste Un Clou, en or et diamants, obtenait aussi des résultats très satisfaisants.
Photos © Cartier.