Mettons de côté l’aspect politiquement correct, les psychologues l’ont établi depuis longtemps : les hommes et les femmes sont différents. Ils pensent et agissent différemment. Les hommes se concentrent exclusivement sur une tâche. Les femmes aiment faire plusieurs choses à la fois. Hommes et femmes achètent aussi différemment. [:]
Leurs approches divergent fortement au moment d’évaluer un produit et de l’acquérir. Cette distinction a fait naître en moi une question que je me pose depuis plus de trente ans que je travaille dans l’industrie du diamant et des bijoux : puisque ce sont les femmes qui achètent presque tous les bijoux vendus au détail, pourquoi y a-t-il si peu de femmes en joaillerie, et notamment à l’étape de conception et de fabrication ?
La plupart du temps, le dessin des bijoux est une tâche en grande partie dominée par les hommes, bien que certains joailliers avant-gardistes comme Tiffany fassent depuis longtemps appel à des créatrices, une stratégie qui a porté ses fruits.
La vente de bijoux diffère largement de la plupart des autres situations de vente au détail. Auparavant, les bijoux étaient généralement achetés par des hommes pour des femmes. Les hommes sont des ingénieurs en herbe ; le concept des « quatre C » a été inventé pour eux, pour leur permettre de comparer les diamants, de la même façon qu’ils comparent la puissance d’un moteur lors de l’achat d’une voiture.
Quant aux femmes, elles ne montrent généralement qu’un intérêt passager pour les quatre C. Elles veulent un « aspect » remarquable et laissent à l’homme le soin de marchander pour obtenir un bon rapport qualité/prix.
Par le passé, les hommes achetaient des diamants et bijoux en diamants pour deux événements particuliers : 1) ils achetaient une bague de fiançailles pour leur promise et 2) à la cinquantaine, offraient un bijou à leur épouse, leurs enfants ou d’autres proches (parfois une petite amie). Les achats se limitaient à ces deux occasions.
Depuis dix ans, deux nouvelles tendances très distinctes ont émergé aux États-Unis : de jeunes femmes ont commencé à acheter plus de joaillerie d’apparence « mode » que de bijoux traditionnels et se sont offert de plus en plus de bijoux.
Quelle importance revêtent ces deux marchés émergents ? Selon une analyse IDEX Online Research portant sur des données du département du Commerce, ce sont ces jeunes acheteuses, dans la vingtaine ou la trentaine, qui ont maintenu à flot l’industrie américaine des bijoux au cours de la grande récession de 2008-2009. Les achats personnels représentent un marché plus difficile à saisir, mais pourraient concerner de 10 % à 15 % de tous les bijoux en diamants vendus sur le marché américain.
En outre, nos propres enquêtes en magasin confirment que les jeunes acheteuses veulent des articles « différents » et « tendance ». Nous avons récemment observé un vendeur de bijouterie qui proposait un très joli pendentif en diamant à une jeune cliente d’environ vingt ans. Il en vantait les vertus, dans l’espoir de conclure une vente rémunératrice. La jeune femme a étudié le pendentif, puis s’est exclamé : « Oh oui, c’est joli. Ma mère adorerait ce bijou. Mais pas pour moi, merci. » Les jeunes consommatrices sont très différentes de la génération du baby-boom : les baby-boomers voulaient la même chose que leur voisin, en plus grand. Les jeunes femmes d’aujourd’hui préfèrent se différencier.
Si l’industrie veut cibler les femmes qui achètent pour elles-mêmes et les jeunes clientes axées sur la mode, les diamantaires doivent intégrer les femmes à leur activité et ne pas se contenter d’un alibi ici ou là. Les femmes doivent être largement impliquées dans tout le processus de production, de la conception des bijoux jusqu’au plan marketing.
Je suis un homme. Je connais mes limites et je sais depuis longtemps que je suis assez ignorant de la conception des bijoux en diamants et de leur commercialisation. Je compte sur les femmes pour m’aider à comprendre ces sujets : ces mêmes femmes sont des consommatrices de diamants et de bijoux. C’est un aspect que les diamantaires doivent étudier, apprendre et mettre en pratique.