Pour cette dernière édition des miniers de la DPA, direction l’Afrique, ou plus exactement les mines africaines, à la rencontre des deux derniers « grands » miniers juniors, partenaires de la DPA : Lucara Diamond Corporation et Petra Diamonds Limited. [:]Leurs stratégies, basées sur des investissements plus que pertinents, des risques limités, une vision prospective sur le long terme et la découverte des pierres les plus rares et exceptionnelles de ces dernières années, font de Lucara et Petra des miniers avec lesquels il va désormais falloir compter.
Lucara Diamond Corporation, du Canada à Karowe, au Bostwana
Lucara Diamond Corporation est une entreprise récente, puisque créée en 2004, qui, même si son siège est basé au Canada à Vancouver, opère au Botswana. Ce minier canadien, côté à la bourse de Toronto, est notamment connu pour avoir découvert, en novembre 2015, l’exceptionnel Lesedi la Rona (« Notre Lumière ») dans sa mine de Karowe au Botswana donc (Karowe AK6). Cette pierre de 1.109 carats est le deuxième plus gros diamant brut jamais découvert au monde depuis le très célèbre diamant Cullinan, de 3.106 carats, extrait en 1905 de la mine du même nom. À l’origine, le Lesedi la Rona pesait 1.500 carats avant de se fracturer ! Ce diamant blanc de type IIA a été proposé à la vente en juin 2016 mais n’a pas trouvé preneur. Il devait en effet être vendu aux enchères « publiques » (hors des circuits de vente traditionnels des diamants bruts), une première a priori pour un diamant brut de ce type*, la maison Sotheby’s à Londres l’ayant évalué à près de 70 millions de dollars. L’échec de cette vente pourrait être dû à la difficulté réelle d’évaluer le diamant taillé qui en découlerait pour les acheteurs potentiels…
Il faut noter que Lucara a vendu, cette même année, un diamant blanc de 813 carats pour 63 millions de dollars (ce qui en fait le diamant brut le plus cher jamais vendu), le Constellation, mais par des circuits de de vente plus traditionnels cette fois, et conservera 10 % dans les bénéfices nets du (des) diamant taillé qui en découlera.
Vous l’aurez compris, ce sont ces pierres incroyables et extrêmement rares qui font la spécificité de Lucara Diamond Corporation et ont assuré la notoriété très récente de ce « petit » minier parmi les plus grands. Une niche qui permet à l’entreprise de fort bien se porter dans un contexte général discutable (les revenus de Lucara s’élèveraient à 229 millions de dollars américains pour les 9 mois clos au 30 septembre 2016).
La possession principale, fleuron et base du développement de Lucara, est bel et bien la cheminée de kimberlite AK6, qui n’est autre que la mine de Karowe, au Botswana (district d’Orapa). Le minier, qui en détenait seulement 40 % à l’origine, a racheté, en 2010, ses parts de cette cheminée prometteuse à African Diamonds qui en possédait alors 60 %. Ce n’est pas le nombre de carats produits (350.000 à 450.000 carats par an) qui fait la richesse de Karowe mais les diamants de très grande valeur, type IIA, qui y ont déjà été trouvés : le Lesedi la Rona donc, le diamant blanc de 813 carats, un autre de 374 carats, etc. Ces pierres sont vendues, plusieurs fois dans l’année, à l’occasion d’enchères exceptionnelles, les « Exceptional Stone Tenders ». Le reste de la production de Lucara est vendu lors de cycles d’enchères réguliers, à raison de quatre cycles par an environ.
Au nombre des autres mines ou projets miniers de Lucara Diamond Corporation : une cheminée de kimberlite à Orapa au Bostwana (la De Beers y est aussi très implantée), le projet de Mothae au Lesotho (à hauteur de 75 %), Kavango en Namibie, et d’autres au Zimbabwe et au Cameroun…
Depuis 2010, la présidence du conseil de Lucara revient à Lukas H. Lundin, fils du fondateur de Lundin Mining et Lundin Petroleum (Lucara est membre du Lundin Group of Companies.) Le CEO et directeur exécutif du minier canadien est William Lamb, ancien collaborateur de la De Beers et dont les actions furent décisives pour l’acquisition de la mine de Karowe.
Petra Diamonds Ltd., un junior devenu grand
Petra Diamonds, dont le siège est basé à Jersey, dans les îles anglo-normandes, a été fondée en 1997 par Adonis Pouroulis qui en est toujours le président. Son directeur général (CEO) est Johann Dippenaar. Son activité minière se concentre en Afrique du Sud et en Tanzanie. Elle mène également un programme d’exploration au Botswana et en Afrique du Sud (Reivilo). L’entreprise est cotée à la bourse de Londres et fait partie de l’indice FTSE 250. Partenariats ciblés et actionnariat (Black Economic Empowerment – BEE – en Afrique du Sud notamment) sont la base (la force !) de la structure du groupe et donnent poids et entregent à ses projets. Les ressources en diamant de Petra Diamonds s’élèveraient à 312 millions de carats environ…
Petra Diamonds Ltd. possède entre autres la très célèbre mine Premier, ou mine Cullinan, du nom du diamant IIa « hors norme » qui y fut découvert en 1905 (3.106 carats, comme évoqué plus haut, taillé pour donner le Great Star of Africa et le Lesser Star of Africa, sertis sur les joyaux de la Couronne britannique !)
En 10 ans l’entreprise s’est beaucoup développée, procédant à des rachats et investissements judicieux, ce qui constitue son modèle de marché avoué : cibler des mines avec un potentiel (à long-terme) encore à développer (la prospective prévaut sur l’exploration), dans lesquelles investir son expertise, sa connaissance et son capital à moindre risque. Ainsi Petra a racheté au moins cinq mines de la De Beers, qui sont parmi ses investissements et projets principaux actuels !
Les diamants issus des mines de Petra Diamonds sont vendus aux enchères, sous forme de lots (les pierres rares, à très haut potentiel ou de couleur, sont vendues à l’unité), à raison d’environ sept cycles d’enchères par an. La production des mines sud-africaines est vendue à Johannesburg, et celle de la mine de Williamson (Tanzanie) à Anvers.
Petra Diamonds est effectivement considérée comme une entreprise en bonne santé. Fin octobre 2016, Polished Prices rapportait dans son Weekly que « Petra Diamonds [était] le titre qui [avait] le plus progressé en plus de trois mois, étant donné la hausse de la production diamantaire** et le maintien des prix des diamants, et ce en dépit des faibles attentes de l’industrie pour la période […]. Petra [aurait] pris jusqu’à 8,5 %, la progression intra-journalière la plus marquée depuis le 4 juillet. »
Petra Diamonds est donc, comme Lucara, connue pour les diamants exceptionnels – en poids et en pureté – issus de ses mines. Ainsi fin novembre 2015, il y a de cela un an environ, le minier a annoncé avoir découvert, dans sa mine de Williamson en Tanzanie, un diamant rose de 23,16 carats, d’une couleur et d’une pureté incroyables (vente prévue dans le cadre des tenders de Petra à Anvers le mois suivant.) L’entreprise annonçait à l’époque : «La pierre est un exemple des diamants roses de grande qualité qui ont fait la réputation de Williamson et constitue notre découverte la plus importante dans la mine à ce jour.»
Parmi les plus que célèbres diamants issus de la mine de Cullinan, un diamant bleu de 29,6 carats, découvert en janvier 2014 et taillé par Cora International pour devenir le Blue Moon of Josephine (12,03 carats, Fancy Vivid), vendu aux enchères pour 48,4 millions de US dollars en novembre 2015. Cette découverte incroyable a consacré le minier à l’échelle mondiale !
Un diamant blanc de 121,26 carats a été découvert par Petra à Cullinan en juin 2016, puis vendu 6 millions de dollars à l’occasion de son processus commercial de juin à Johannesburg. La même mine a ensuite mis au jour un autre diamant blanc exceptionnel de 138,57 carats en août !
Lucara, Petra et leurs diamants exceptionnellement rares, de ceux qui entrent dans la catégorie des diamants d’investissement ou que l’on attend sur les pièces de haute joaillerie des prochaines années, concluront donc notre série sur les miniers.
Les miniers fondateurs de la DPA, à une époque de grand changement dans l’industrie du diamant et où la structure du marché est bousculée, ne sont certes pas les seuls avec lesquels il faut aujourd’hui compter. Mais leur poids financier et stratégique actuel et à venir en fait, tout de même, les plus importants miniers à ce jour pour notre industrie.
* Trois autres diamants bruts ont été vendus aux enchères lors la vente de Sotheby’s, mais pour des sommes beaucoup moins considérables, entre 40.000 et 57.000 dollars américains environ.
** Hausse de la production à court terme après une baisse pour nombre de miniers en 2015. Dans son rapport Diamond Insight, la De Beers évaluait la part de Petra dans la production mondiale de brut à 3 %. Lire : Normalisation de l’activité dans la filière intermédiaire – De Beers (3/10/16) et La production mondiale de diamants a diminué de 4,2 % en 2015.`
À lire également :
– La production de diamants en hausse – perspectives
– Rio Tinto : des diamants roses d’exception… et après ? – Miniers de la DPA partie 3
– ALROSA, le challenger – Miniers de la DPA partie 2
– Miniers de la Diamond Producers Association – Focus sur la De Beers
Photo © Courtesy of Lucara Diamond Corp. & Petra Diamonds Ltd.