L’annonce la plus importante de la semaine du 16 avril a sans conteste été la préparation par De Beers Group du pilotage d’un programme appelé GemFair. Son objectif est de créer un parcours sécurisé et transparent afin de commercialiser des diamants d’extraction artisanale et à petite échelle (ASM), de provenance éthique. Le minier a affirmé que GemFair ferait appel à une technologie dédiée afin de consigner la production ASM des sites miniers qui se sont conformés aux normes éthiques. Cela permettra d’acheter du brut auprès de sites approuvés, tout en aidant à améliorer les conditions de travail et les moyens de subsistance des personnes travaillant dans ce secteur.
GemFair sera associée à l’Initiative diamant et développement (DDII), une ONG qui travaille depuis 10 ans pour officialiser le secteur ASM dans plusieurs régions d’Afrique. Les mineurs qui souhaitent participer au projet pilote GemFair doivent être certifiés conformes par la DDII et respecter les autres normes spécifiques au modèle d’activité GemFair.
Une fois la certification éthique obtenue, De Beers fournira aux mineurs qualifiés une solution technologique comprenant une application et une tablette dédiée, accompagnées d’une « boîte à outils » diamantaire qui permettra le suivi numérique des diamants ASM tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Le projet pilote sera lancé en Sierra Leone, où plusieurs sites miniers artisans participent déjà au programme Maendeleo Diamond Standards de la DDII et où des progrès significatifs ont été accomplis par le gouvernement afin d’officialiser le secteur ASM.
Comme l’a expliqué Bruce Cleaver, le PDG de De Beers Group : « Le secteur ASM représente une source de revenus essentielle pour de nombreuses communautés touchées par la pauvreté. Toutefois, comme certaines parties du secteur sont principalement informelles et sans régulation, elles n’ont pas accès aux marchés internationaux bien établis ni la capacité d’obtenir une juste valeur pour les participants. En offrant un parcours sécurisé vers les marchés, en proposant des prix justes et en aidant à relever les niveaux, nous espérons améliorer les perspectives des personnes travaillant dans ce secteur, tout en offrant la possibilité d’une nouvelle source d’approvisionnement pour De Beers à plus longue échéance. »
Dorothée Gizenga, directrice exécutive de l’Initiative diamant et développement, a expliqué : « La DDII travaille pour s’assurer que les mineurs artisans et de petites exploitations aient accès aux opportunités, aux informations et aux outils qui permettent de créer des communautés autonomes et de reconnaître officiellement la contribution de ce secteur au développement économique. Selon nous, GemFair a le potentiel pour transformer véritablement le secteur en offrant un parcours nouveau et sécurisé vers les marchés, par l’intermédiaire de la première société de diamants au monde. Nous sommes heureux de poursuivre notre collaboration avec De Beers, le gouvernement de Sierra Leone et toutes les autres parties prenantes à mesure que le travail avance. »
La phase pré-pilote de GemFair nécessitera l’installation d’une structure en Sierra Leone et une collaboration avec la DDII et les sites miniers inscrits pour s’assurer du respect des normes acceptées, mais aussi pour que les mineurs participants soient formés à l’utilisation de la solution technologique et qu’ils comprennent mieux la classification des diamants.
Une fois que GemFair et la DDII seront certains que les sites sont conformes et que la technologie fonctionne bien, le projet pilote débutera et GemFair commencera à acheter des diamants aux mineurs participants. Même si des offres seront faites sur les éventuels diamants mis en vente, quelle que soit la qualité, les mineurs n’auront aucune obligation de vendre à GemFair. Tout achat approuvé se fera par le biais du canal de ventes aux enchères de De Beers. La phase pré-pilote débutera ce mois-ci, le but étant que le premier achat ait lieu au cours de l’année 2018. Aucune échéance n’est établie pour l’achèvement du projet pilote.
Après de vastes recherches pour mieux comprendre le secteur ASM et ses besoins spécifiques, De Beers est en train de développer une solution technologique comprenant une tablette et une application logicielle qui inclut les positionnements GPS et un équipement « d’étiquetage » avec code QR. Le logiciel a été conçu pour fonctionner en mode connecté et déconnecté, afin de permettre aux mineurs de l’utiliser à différents endroits. La boîte à outils des diamants comprend un matériel capable de fonctionner dans des sites difficiles, il peut notamment être alimenté par des chargeurs solaires. Le programme implique également d’apporter aux mineurs participants une formation sur la classification des diamants afin de les aider à mieux comprendre le produit qu’ils vendent.
Si les résultats sont concluants, la technologie utilisée par GemFair sera intégrée dans la plate-forme Blockchain de l’industrie diamantaire actuellement développée par De Beers, ce qui permettra au secteur ASM de participer à la Blockchain et d’offrir des garanties supplémentaires sur sa production.
Jusqu’à 20 % des diamants de qualité dans le monde sont produits par des mineurs artisans, des personnes qui creusent le sol à l’aide d’outils rudimentaires. Bien souvent, c’est toute la famille qui est concernée, y compris les enfants. On compte 1,5 million de mineurs artisans en Afrique et en Amérique du Sud, travaillant dans 18 pays différents et dans des conditions associant difficultés, saleté et souvent danger. Néanmoins, l’extraction artisanale contribue fortement à la subsistance de millions de personnes.
La chaîne de négoce des diamants d’extraction artisanale était – et reste – majoritairement gérée de façon informelle, sans documents papier ni tenue de dossiers, ce qui la rend fortement intraçable.
Il faut donc certainement féliciter De Beers pour sa toute dernière initiative. L’industrie diamantaire doit montrer au grand public qu’elle s’est engagée envers un marché équitable, qui améliore les conditions de vie des mineurs artisans et de petites exploitations. La traçabilité est également essentielle à cet égard. La conformité et la transparence sont des éléments critiques à chaque étape de la chaîne de contrôle, de la production à l’exportation, de la fabrication à la vente au détail.
Si le mécanisme de traçage n’est pas en place à chaque étape de la chaîne de contrôle, l’industrie des bijoux et les consommateurs reçoivent un produit qui ne répond pas à leurs exigences de garantie d’un approvisionnement responsable et éthique. Mais dans un environnement Blockchain, chaque acte d’achat ou de vente est enregistré dans ce que l’on appelle la chaîne et devient automatiquement un « bloc » englobant ces informations, données ou caractéristiques uniques au diamant, à mesure qu’il progresse dans la chaîne de valeur.