Si vous n’avez pas eu l’occasion de lire l’article de couverture d’Idex Magazine dans l’édition de mars, prenez quelques minutes ce week-end pour le parcourir. [:]Dans mon article, « The Diamond Iceberg and Climate Change », j’avance l’idée que l’avenir du mêlé naturel est menacé par le mêlé synthétique. Non pas que ce dernier soit meilleur mais, du fait de pratiques frauduleuses dans la fabrication et le négoce de synthétiques, toute la filière d’approvisionnement risque de perdre confiance dans le mêlé naturel.
Dans un récent entretien avec Stephen Lussier, vice-président exécutif du marketing pour De Beers Group, le Gem & Jewellery Export Promotion Council (GJEPC) indien lui a demandé s’il était préoccupé par l’influence des prix des synthétiques sur la valeur du mêlé naturel.
Stephen Lussier n’y voit pas de danger. Il a déclaré : « Le ralentissement constaté dans les petites marchandises au second semestre de l’année dernière est principalement cyclique, il est majoritairement dû à la dynamique de l’offre et de la demande… Alors que le premier semestre 2018 a été très satisfaisant, nous avons assisté à un cumul des stocks dans la filière intermédiaire pendant la période qui a suivi, en raison notamment de la situation sur trois des marchés les plus importants pour les diamants de petites marchandises : l’Inde, la Turquie et le Moyen-Orient… Deux autres facteurs influeront sur la demande et l’offre à moyen terme. Tout d’abord, il y a le fait qu’Argyle, le plus gros fournisseur de petites grosseurs de ces vingt dernières années arrive à la fin de son cycle de vie. Dans quelques années, il ne faudra plus compter sur cet approvisionnement, ce qui va considérablement réduire la quantité de brut de petite grosseur entrant dans la filière. »
Malheureusement… Stephen Lussier a choisi de ne pas évoquer le sujet brûlant. Il n’a pas dit un mot sur les anciennes pratiques frauduleuses à grande échelle consistant à mélanger le mêlé synthétique dans des plis de diamants naturels. Il n’a pas non plus expliqué que ces pratiques continuent ni que les dirigeants de l’industrie locale ne les ont pas encore enrayées correctement et efficacement.
Certes, Stephen Lussier a expliqué, et à juste titre, que la fermeture d’Argyle réduirait l’offre de brut de petites marchandises apportée au marché, mais il a fermé les yeux sur le fait que, à l’échelon international, les producteurs de diamants dans leur ensemble, et un groupe de miniers junior en particulier, sont en danger de faillite parce que les prix actuellement réglés sur le marché pour le brut de petites marchandises sont bien trop bas. En fait, un marché diamantaire sans un marché dédié rentable, dynamique et solide pour ce type de brut ne serait pas durable.
Concernant ces miniers, voici un extrait de l’article de couverture de mars :
« Bien entendu, pour quasiment toutes les sociétés d’extraction de diamants, indépendamment de leur taille, ces petits diamants bruts représentent la base de l’activité. Et comme nous l’avons appris ces derniers mois, une chute des prix de cette catégorie particulière de brut peut faire ou défaire un modèle d’activité pour ces miniers. Tout récemment, lors de la conférence « Investing in Africa Mining Indaba » en Afrique du Sud, Paul Bosma, PDG du minier junior Firestone Diamond, aurait déclaré : « À quel moment le marché du brut va-t-il se reprendre ? Nous avons établi que nous avions perdu entre 15 dollars et 17 dollars par carat à cause du recul du marché. »
Bien entendu, Stephen Lussier sait tout cela. Ce qui m’inquiète, c’est qu’il ait décidé de le passer sous silence. Un marché du mêlé – brut et taillé – malade menace le bien-être et l’avenir de toute la filière d’approvisionnement des diamants.