La De Beers vante le marché tout en minimisant sa production ; on pouvait s’attendre à ce qu’elle procède ainsi, vu le contexte économique actuel. Et elle n’est pas la seule, d’autres miniers lui emboîtant le pas.[:]
La société a donc fait passer deux messages distincts, puisqu’elle a réduit ses prix lors du sight du mois d’août de la Diamond Trading Company (DTC). La De Beers a déclaré qu’elle ne procèderait à aucune baisse supplémentaire et qu’à court terme, l’offre resterait limitée. Philippe Mellier, le PDG de la De Beers, a, lors d’une conférence de presse au salon de Hong Kong la semaine dernière, indiqué que la DTC ne répondrait pas aux demandes des sightholders jusqu’à la fin de la période d’ITO (intention de vendre) en mars 2013.
La restriction de l’offre aidera la De Beers à maintenir ses niveaux de prix ; M. Mellier est donc reparti en laissant derrière lui un message sous-jacent de la société : malgré le marché difficile, « l’industrie doit être optimiste pour s’assurer que les prix vont augmenter. »
La hausse des prix sera certainement la marque de fabrique de la nouvelle structure actionnariale de la De Beers, les actionnaires d’Anglo American voulant rentabiliser au mieux leur investissement ; quant au Botswana, qui détient 15 % de la De Beers, il doit donner un coup de pouce à son budget.
Mais ce qui est bon pour la De Beers peut ne pas l’être pour l’industrie, et ce malgré sa position proclamée de leader. Nous l’avons déjà indiqué dans cette rubrique, les sociétés minières sont incapables de réduire leurs activités dans un marché en déclin, comme peuvent et doivent le faire les négociants. Ainsi, avec des coûts fixes à régler, leur seule option consiste à ajuster l’offre pour maintenir leurs prix et ainsi optimiser leurs bénéfices.
Toutefois, le fait que la De Beers limite son offre suite à la baisse de la production est trompeur. Au contraire, elle a réduit sa production après une baisse de la demande. Selon un sightholder, interrogé par Rapaport News : « La DTC ne respecte pas son ITO car les sightholders risqueraient de continuer à refuser leurs marchandises. » En fin de compte, le marché est dirigé par la demande, et non par l’offre.
De même, les prix du brut sont forcément subordonnés à la demande. Si les sightholders en venaient à perdre de l’argent après avoir acheté du brut, ils finiraient par refuser les marchandises et obliger les fournisseurs à proposer des prix plus abordables.
Tel a été le cas ces derniers mois. Les sightholders ont refusé les marchandises du sight de mai de la DTC jusqu’à ce que celle-ci ajuste ses prix en août. Depuis lors, les négociants de brut ont vu leurs marges s’améliorer, tandis que les fabricants aperçoivent un peu de lumière au bout du tunnel mais affirment continuer à perdre de l’argent sur les opérations de taille.
Le salon de Hong Kong a clairement montré qu’il est tout simplement plus rentable d’acheter du taillé des pierres taillées que de tailler du brut et que les fabricants font fonctionner leurs usines à capacité réduite.
M. Mellier a souligné que les prix du brut et du taillé sont en équilibre et que le sight de la DTC qui commence mardi 2 octobre devrait être relativement réduit, avec peu voire pas d’ajustements de prix.
Par conséquent, l’annonce par la De Beers à Hong Kong d’une réduction de l’offre dans les six prochains mois doit être considérée comme un avertissement. D’autres miniers y ont fait écho.
Les ventes d’ALROSA reculent d’environ 7 % cette année et sa production a été réduite d’environ 15 %. Harry Winston a déclaré avoir réservé 65 millions de dollars de brut pour le vendre lorsque le marché s’améliorera. Petra Diamonds prévoit quant à elle que le marché reste sous pression à court terme au vu des incertitudes économiques actuelles.
Les négociants au salon de Hong Kong étaient sur la même longueur d’onde et sont malgré tout repartis d’humeur plutôt optimiste. Il semblerait qu’ils se soient habitués à la demande ralentie constatée en 2012. Le salon, qui s’est tenu du 19 au 25 septembre, a rassemblé des acheteurs sélectifs (cherchant principalement une baisse des prix des VS2-SI) et sensibles au prix. Ils ont procédé à de nombreuses comparaisons avant d’effectuer leurs achats.
Les négociants estiment que la demande des consommateurs augmentera d’un faible pourcentage à un chiffre cette année mais reconnaissent que les détaillants réalignent leurs stocks pour se prémunir d’un éventuel ralentissement. La De Beers a convenu de cette situation. M. Mellier a déclaré s’attendre à ce que la croissance de la Chine soit entraînée par l’expansion des villes de niveau 3 et 4 et à ce que la demande des consommateurs aux États-Unis reste stable ; elle pourrait être favorisée par la récente
décision de Ben Bernanke, le président de la Réserve fédérale, d’injecter des capitaux dans le marché américain grâce à une nouvelle série de mesures d’assouplissement quantitatif. La récente hausse de la confiance des ménages témoigne peut-être de cela, mais le temps, et surtout les ventes du quatrième trimestre, nous diront si c’est effectivement le cas.