Croyez-le ou non, le quatrième trimestre est généralement calme sur le marché diamantaire. Cette affirmation va peut-être en étonner certains, en particulier à la veille du week-end de Thanksgiving, qui marque le début de la saison des fêtes. [:]Il faut toutefois souligner que la période est plus propice aux achats qu’au négoce. Aucun joaillier compétent et bon gestionnaire n’attendra novembre-décembre pour se constituer un stock pour la saison.
Les diamantaires patientent plutôt jusqu’à Noël et au Nouvel an chinois pour savoir ce qui les attend. Après tout, une bonne saison commerciale devrait encourager les détaillants à se réapprovisionner dans les mois qui suivent. Un fabricant, qui possède également un négoce de bijoux et une légère expérience de la vente de détail, l’a affirmé à Rapaport News : « Aucun joaillier ne veut voir ses vitrines vides. Il va anticiper pour acheter ce dont il aura besoin dans les quatre à six mois. »
Ces mots devraient être doux aux oreilles des fabricants et des négociants, qui disposent actuellement de stocks assez importants. En vérité, les joailliers devraient acheter dès maintenant pour février-mars, ce qu’ils ne semblent pourtant pas faire. Si les détaillants de bijoux connaissent une fin d’année satisfaisante, ils devraient au moins commencer à acheter des diamants au premier trimestre.
Toutefois, la prévision des niveaux de stock peut être complexe. Les adapter à la demande à court terme est devenu plus compliqué, à mesure que les marchés sont devenus plus volatils. Il est donc essentiel de comprendre le cycle des affaires, à chaque étape de la filière, pour connaître ses propres besoins en matière de stock.
Lors d’une récente présentation d’Anglo American aux analystes, la De Beers a abordé la question de la saisonnalité de la demande des bijoux en diamants sur les marchés de consommation. La société a remarqué qu’environ 30 % à 40 % des ventes de détail annuelles de bijoux en diamants aux États-Unis avaient lieu en novembre-décembre, avec une demande stable étalée entre la Saint-Valentin, la fête des Mères et la saison des mariages en été. La Chine connaît des pics au cours du Nouvel An chinois en février et des Semaines d’Or en mai et en octobre, tandis que les ventes en Inde sont rythmées par Diwali et la saison des mariages qui suit.
De la même façon, les importations américaines de taillé atteignent généralement leur apogée en octobre ou novembre – sans compter les importations exceptionnelles effectuées en mai pour le salon JCK Las Vegas, dont une grande partie sera réexportée en juin. Pour recevoir des marchandises en octobre-novembre et avoir suffisamment de temps pour les sertir sur des bijoux pour la saison, les joailliers doivent passer commande quatre à cinq mois à l’avance.
La même équation pourrait être appliquée plus en aval dans la filière. La De Beers estime qu’il faut environ neuf mois entre l’extraction de brut et sa mise en vente au consommateur. Sur ces neuf mois, quatre à cinq sont consacrés à la fabrication et à la certification.
Les fabricants achètent donc théoriquement du brut entre mai et juillet, pour que le taillé soit prêt pour les joailliers aux environs d’octobre. Cette année, les fabricants ont également dû tenir compte des délais de certification allongés au Gemological Institue of America (GIA). Quoi qu’il en soit, les plus gros sights de la De Beers ont généralement lieu autour du mois de juillet. Il n’est pas exagéré de présumer que les joailliers commandent du taillé en mai (lors du salon JCK de Las Vegas), après quoi les fabricants achètent leur brut et accélèrent la fabrication.
Bien entendu, le marché est plus fluide que ce que suggèrent ces modèles théoriques.
Pourtant, la même logique pourrait être appliquée au moment de se préparer à la demande d’Extrême-Orient. Le Nouvel An chinois ayant lieu le 19 février, les détaillants chinois devraient prendre livraison des marchandises dans un mois ou deux – sauf si leurs stocks sont déjà suffisants.
En effet, la demande d’Extrême-Orient devrait actuellement être solide. Or, c’est le contraire. La situation pourrait traduire un ralentissement de la demande des consommateurs en Chine. Peut-être aussi que les niveaux de stock sont toujours suffisants grâce aux achats de cette année. Les rapports de cette semaine sur les gains de Chow Tai Fook et Luk Fook Holdings vont dans ce sens, ces deux grands joailliers hongkongais enregistrant un effondrement des ventes et un stock supérieur pour le semestre clôturé le 30 septembre.
Chez Chow Tai Fook, le stock de matière brute, destinée aux bijoux sertis, a reculé de 9 % au cours du semestre mais celui de bijoux sertis a bondi de 23 %. Le stock total de Luk Fook a progressé de 11 %.
Les niveaux de stocks sont élevés partout dans la filière, les échanges ayant ralenti depuis avril. En outre, les marchandises qui étaient bloquées dans les laboratoires de certification inondent maintenant le marché. Les acheteurs de taillé font pression sur les fournisseurs pour qu’ils baissent leurs prix, car ils ont compris que la rareté des liquidités pourrait les obliger à vendre moins cher afin d’obtenir de la trésorerie. Les acheteurs sont également prêts à patienter.
Ils attendent de voir si les prix du taillé vont encore reculer et si les détaillants américains profiteront d’une saison commerciale positive à Noël, qui pourrait stimuler la demande des négociants au premier trimestre 2015. Si l’on étudie le cycle des échanges sur l’indice RapNet (RAPI™) ces deux dernières années, les prix du taillé ont reculé au quatrième trimestre et se sont raffermis lors du premier trimestre suivant.
Il devrait en être de même cette année. En étant réalistes, les détaillants prévoient une bonne saison des fêtes et ils ont des raisons d’espérer que les acheteurs reviendront sur le marché au premier trimestre pour se réapprovisionner. Peut-être aussi achèteront-ils simplement pour remplir leurs stocks, à un niveau suffisant pour durer jusqu’à la fin de l’année. Après tout, avec le repli des prix du taillé et des fabricants sous pression, la période est clairement idéale pour acheter au cours du mois ou des deux mois qui viennent – c’est-à-dire, au moins jusqu’à ce que le cycle redémarre.