Les demandes pour que le sujet de la Russie soit abordé à la séance plénière annuelle du Kimberley Process (KP) ont été rejetées, l’organisation ayant reçu des avis divergents quant à savoir si le sujet relevait de son mandat.
L’Union européenne (UE) et cinq gouvernements nationaux avaient écrit au président du KP avant la réunion pour demander de mettre le conflit en Ukraine à l’ordre du jour de l’assemblée qui s’est tenue au Botswana au cours de la semaine du 31 octobre.
Toutefois, « les avis divergeaient quant à savoir si le contenu des lettres était pertinent par rapport au mandat du KP, d’après le communiqué publié par le KP lundi 7 novembre, après l’événement. De fait, la question n’a pas été discutée à la séance plénière. »
Au cours des semaines qui ont précédé la réunion, des ministres d’Australie, du Canada, du Royaume-Uni, d’Ukraine et des États-Unis ont pressé Jacob Thamage, président botswanais du KP en 2022, de créer un espace de discussion à propos des implications de la guerre en Ukraine. Certains des courriers posaient la question de savoir si les actions militaires de la Russie étaient cohérentes avec sa qualité de membre actif du KP. Le KP a fait figurer les lettres en annexe du communiqué.
« Si le Kimberley Process veut continuer à apporter des garanties crédibles que les diamants exportés avec un certificat du KP sont véritablement exempts de conflits, il ne peut pas éluder les questions valables qui ont été soulevées, comme de savoir si le brut exporté par la Russie finance son invasion de l’Ukraine, a écrit Cheryl Urban, directrice générale du développement économique d’Affaires mondiales Canada, le bureau des affaires étrangères du pays, le 24 octobre. Nous regrettons qu’un dialogue formel n’ait pas encore eu lieu via le Kimberley Process, malgré la volonté exprimée par de nombreux membres. »
Les États-Unis ont, quant à eux, appelé le KP à évaluer la pertinence de maintenir la Russie à la présidence de deux de ses groupes de travail.
« Même si le KP ne parvient pas à un consensus sur la présence de diamants du conflit en Russie, nous pensons que ni la Russie, ni ses défenseurs ne doivent occuper des postes de responsabilité au KP en raison de l’agression actuelle de l’Ukraine », a écrit Whitney Baird, secrétaire adjointe principale au Bureau des affaires économiques et commerciales du Département d’État américain, dans une lettre non datée.
L’Ukraine a avancé qu’il était « immoral de maintenir la Fédération de Russie et la Biélorussie [alliée de la Russie] au sein du KP. »
La Russie, la Biélorussie, le Kirghizistan, l’Arménie, le Venezuela et la République centrafricaine (RCA) ont tous écrit pour s’opposer aux discussions sur la Russie, certains prétendant que le KP s’était politisé.
Lors de la séance plénière, organisée du 1er au 5 novembre à Gaborone, au Botswana, Michael Yoboue, coordinateur de la Coalition de la société civile du KP, qui a critiqué l’organisme pour son incapacité à se réformer, a prononcé un discours.
« Le KP n’autorise pas les discussions sur la façon dont le premier producteur au monde, la Russie, utilise les revenus des diamants pour financer une guerre cruelle contre l’Ukraine, autre membre du KP », a affirmé Michael Yoboue.
Un discours plus mesuré a été prononcé par Edward Asscher, président du World Diamond Council (WDC), pour qui « le KP n’est probablement pas […] à même de jouer un quelconque rôle constructif dans la résolution de la guerre en Ukraine. »
« Quoi que moi ou mes collègues pensions personnellement des événements tragiques qui se déroulent en Europe centrale, une guerre entre deux États souverains n’est clairement pas du ressort du KP », a déclaré Edward Asscher dans son discours d’ouverture de la séance plénière. Il a pourtant ajouté : « Malgré notre neutralité, nous ne sommes pas moralement indifférents. »
Parallèlement, le KP mettra sur pied un secrétariat permanent à Gaborone qui entrera en service en janvier 2024, d’après le communiqué.