Le doux parfum du succès que connaît le café est l’occasion, pour les diamants, d’en tirer quelques leçons. En Israël, une tasse de cappuccino coûte entre 10 et 15 shekels (de 2,80 $ à 4,20 $), selon l’établissement et son emplacement. [:]Depuis 2008, le prix de la tasse, servie dans un café, a plus que triplé par rapport à l’inflation. Sa progression a été de 25 %, tandis que l’inflation, pendant ces cinq années, a évolué d’environ 8 %, selon le cabinet d’étude des entreprises BDI. Il y a quelques semaines, un spécialiste de la vente discount a ouvert à Tel Aviv un café avec des boissons à emporter. Le concept est de tout proposer à 5 shekels (1,40 $) : sandwichs, pâtisseries et cappuccinos. Le prix d’une tasse étant de la moitié ou du tiers de celles vendues dans la plupart des autres établissements, on pourrait craindre que le café proposé soit de moindre qualité et coûte donc moins cher à préparer. Or, la plupart des clients qui s’y sont rendus ont apprécié la boisson qui leur avait été servie.
L’intérêt de cette histoire, selon moi, ne réside pas dans la bataille que se livrent les commerçants, mais bien dans l’économie sous-jacente du café, et en particulier les prix des matières premières. En 2008, le prix composite de l’OIC (Organisation internationale du Café) a atteint 124,25 cents de dollar la livre (1,2425 $/livre). Il a ensuite progressé de 86,1 %, pour culminer à 2,31 $ en avril 2011. Depuis, il a perdu plus de la moitié de sa valeur, dans une dégringolade qui n’est pas encore terminée. Malgré la forte progression par rapport à 2008, le prix moyen du café en tant que matière première est aujourd’hui inférieur de 10 %.
Vous vous demanderez peut-être pourquoi j’évoque ici le marché du café. En réalité, ce secteur est porteur d’enseignements. Ainsi, le décalage est flagrant entre le coût de la matière première et celui du produit de détail, comme entre le brut et le taillé vendu en boutique.
Le commerçant discount a montré qu’il existait une alternative viable au mode de fonctionnement de ses concurrents, qui augmentent constamment les prix, tout en variant les goûts ou les présentations. Pour le café, comme pour les diamants, le choix du volume peut être la clé d’un commerce réussi, même avec des produits, services et présentations de haute qualité.
De surcroît, aucun producteur ne se préoccupe de la transparence des échanges des grains de café ni de leur prix de vente. Cela n’empêche pas la hausse du prix de la tasse, même si celui des grains est en baisse. En effet, les consommateurs qui font la queue chez Starbucks ne vérifient pas le prix au kilo de l’arabica doux de Colombie, du robusta ou l’indice des prix composite de l’OIC.
Après tout, les négociants qui refusent que les prix soient dévoilés craignent que les consommateurs ne s’emparent de cette information pour réduire leur rentabilité. Les petits cafés de quartier, tout comme les grandes chaînes de détail, prouvent que les consommateurs sont prêts à payer toute une gamme de prix, presque sans aucun lien avec le cours de la matière première. En effet, les détaillants se disputent leurs clients en proposant diverses qualités, expériences, ambiances et services. Le secteur des bijoux en diamants peut le faire et devrait s’y résoudre. D’ailleurs, il arrive qu’il le fasse. La transparence des prix n’aura pas d’effet négatif à ce niveau. Elle ne fera que rendre le négoce plus sophistiqué.
Pour rappel, le prix d’une capsule Nespresso aux États-Unis équivaut à environ 54 $ la livre, contre 1,1182 $ la livre à l’OIC en septembre. La différence est énorme, elle s’élève à 4829 % entre le prix de gros de la matière première, en tout début de chaîne, et le prix de la fine mouture haut de gamme, appréciée à la maison par les connaisseurs. En outre, à 0,60 $, la capsule Nespresso coûte beaucoup moins cher qu’une tasse de café dans n’importe quel café.
Imaginez maintenant le doux arôme des marges dodues qui sont réalisables avec un excellent marketing et ce, malgré la transparence des prix.