Février est un mois crucial pour les mines de diamants du Canada. Installées dans la région la plus éloignée des Territoires du Nord-Ouest gelés du pays, Rio Tinto, Dominion Diamond Mines et De Beers ont une fenêtre de deux mois pour faire la liaison entre leurs opérations minières et le monde extérieur.[:]
La route de glace hivernale, officiellement appelée Tibbitt to Contwoyto Winter Road (TCWR), a ouvert le 1er février, marquant le 20e anniversaire de l’union des trois sociétés dans la gestion du projet. La route a été construite dans les années 80 pour alimenter la mine d’or de Lupin qui a fini par fermer. Les miniers ont repris le projet au début de la ruée vers les diamants du Canada en 1999.
La route est essentielle pour permettre aux miniers de transporter les vivres vers leurs mines respectives d’Ekati, Diavik et Gahcho Kué, tellement isolées que les employés ne peuvent aller travailler qu’en hélicoptère. Sans cela, le travail dans les mines serait impossible, souligne Ron Near, directeur de la route d’hiver.
« Il était évident que si Rio Tinto voulait réussir à développer Diavik lorsque la mine a été découverte, la société devait approvisionner le projet de mine en passant par la route de glace, a-t-il expliqué dans un e-mail à Rapaport News. Sans cette approche, la construction de la mine aurait été irréalisable. »
La course au lancement
Cinq entrepreneurs spécialisés en génie civil, construction, sécurité, sûreté et distribution, ont construit le tronçon de 600 km, pour un coût annuel de 20 millions CAD (15,2 millions USD), explique Ron Near.
L’équipe de 400 ouvriers a lancé les premiers travaux de construction le 15 décembre, dégageant la neige installée de la surface pour favoriser la formation de la glace. L’équipe principale les a rejoints le 1er janvier, travaillant pendant une fenêtre de 30 jours afin d’achever le projet à temps pour l’ouverture.
Le travail n’est pas encore terminé, même si la route est ouverte. Les ouvriers doivent continuer à manipuler la glace pour préserver la route le temps du projet, tout en surveillant divers facteurs, comme la vitesse des camions, leur distance de sécurité et leur poids. Aussi peu pratique que puisse paraître cette construction, sans elle, l’extraction dans la région ne serait pas rentable.
« Réapprovisionner les mines d’une quelconque autre façon aurait un coût prohibitif, fait remarquer Ron Near. Ce serait de 10 à 20 fois plus cher que d’utiliser la route. »
La sécurité en chiffres
Conduire sur la route de glace peut être un travail dangereux, car une grande partie du chemin est bâtie sur des lacs gelés. Un programme d’assurance qualité est en place pour assurer la règlementation sur la route et assurer la sécurité de tous les utilisateurs, explique Ron Near. Au total, 22 officiers de sécurité surveillent les camions à l’aide de pointeurs radars pour s’assurer qu’ils ne dépassent pas la vitesse maximale de 25 km/h une fois chargés à plein. Il faut de 14 à 16 heures aux camions transportant près de 300 000 tonnes de cargaison pour parcourir les 400 km entre Yellowknife et la mine Ekati, ajoute-t-il.
Cette année, entre 600 et 800 chauffeurs dans plus de 8 300 camions réaliseront les allers-retours avec les mines, partant de Yellowknife toutes les 20 minutes, d’après Ron Near. Ils travaillent par équipes allant jusqu’à quatre personnes car les chauffeurs ne sont pas autorisés à parcourir seuls la route d’hiver. Trois camps sont répartis tout au long du trajet pour fournir aux chauffeurs de la nourriture, des installations sanitaires et des services de maintenance d’urgence.
20 ans ensemble
À titre incitatif, les trois sociétés distribuent 16 primes de sécurité de 1 500 CAD (1 138 USD) aux chauffeurs méritants chaque année. Et pour fêter le 20e anniversaire de la route, elles rajoutent cinq lots de 5 000 CAD (3 792 USD) en faveur de chauffeurs spéciaux, désignés par leur société de sous-traitance. Enfin, chaque mine participante offrira un diamant à trois ouvriers du projet ayant fait preuve d’engagement, de soutien et d’innovation pour sécuriser et améliorer le projet, affirme Ron Near.
Les sociétés soulignent que les efforts des ouvriers se font quasi-exclusivement au bénéfice des mines car il y a très peu d’autres activités dans cette vaste région et elles ne peuvent travailler que durant une période très limitée. « La route est également utilisée en faveur d’autres projets d’exploration, de camps de vacances et de véhicules privés mais il n’existe aucune communauté le long de la route, autres que les grandes mines de diamants, souligne-t-il. Une fois le projet terminé, la route finira par fondre et nous recommencerons tout l’année prochaine. »