Lors du JCK Las Vegas, les exposants de synthétiques ont pris de l’ampleur, presque autant que les avis sur les pierres elles-mêmes. Pour répondre aux besoins croissants du marché, les organisateurs ont lancé le Quartier des synthétiques à l’occasion de l’édition 2018 du salon commercial.[:]
« Certains exposants ont pu présenter des synthétiques au salon ces dernières années mais ils n’ont été regroupés dans un « pavillon » qu’en 2018, explique Sarin Bachmann, vice-président des événements pour le JCK et Luxury. Les synthétiques sont un segment en plein essor. Il est maintenant important pour les acheteurs qu’il existe une délimitation claire autour de la catégorie. »
C’est la raison pour laquelle, l’année dernière, le salon a ajouté une section dédiée de 595 m² pour 29 exposants de synthétiques afin qu’ils présentent des pierres et des bijoux. C’est également la raison pour laquelle la fréquentation de cet espace a augmenté de 40 % cette année, atteignant près du double du nombre de participants.
« Ils ne vont pas disparaître »
Les défenseurs des synthétiques voient des avantages à ce que ces pierres partagent la vitrine avec des diamants naturels car les bijoux en synthétiques sont une alternative aux dépenses discrétionnaires des consommateurs, contrairement à d’autres catégories de produits.
En effet, les synthétiques ont aidé l’entreprise familiale de Pia Aiya, un bijoutier de quatrième génération, à subsister pendant la crise. « Les synthétiques sont nés d’un besoin mais ils sont devenus autre chose, explique le directeur des opérations d’Aiya Designs. Ils sont maintenant une autre voie, ou un outil. »
Raj Vaidya, propriétaire de DiamSpark Lab Grown Diamonds, une société créée il y a six mois, en convient. « Ils ne vont pas disparaître », explique-t-il, alors que sa société-mère exerce dans l’industrie des diamants naturels depuis 25 ans.
« L’aspect bon marché des synthétiques les a fait connaître du grand public, ajoute-t-il. L’industrie les achète vraiment en grandes quantités – parfois par lots de 1 000. Et ils ne sont pas vendus en consignation. »
Le prix est peut-être le facteur le plus important qui pèse sur les décisions d’achat des clients. Les synthétiques peuvent coûter un tiers du prix des diamants naturels, d’après les personnes interrogées. Le développement durable et l’approvisionnement transparent viennent juste après.
Evolv, une division du fabricant de longue date Joseph Blank, s’est aventurée dans le milieu des synthétiques en 2016, bien que les ventes n’aient vraiment démarré que récemment. Aujourd’hui, l’activité est tout aussi viable que celle des diamants naturels.
« Les consommateurs sont moins réticents mais l’industrie l’est plus, bien que nous continuions à constater des hausses graduelles de la demande, explique Douglas Blank, le PDG. Notre société a 100 ans et les synthétiques me font travailler, le téléphone n’arrête pas de sonner. »
Bien entendu, les chiffres des achats individuels peuvent paraître particulièrement bas par rapport à ceux des diamants naturels. « Nous venons de vendre une pierre synthétique de 3,50 carats pour 13 000 dollars. Un diamant naturel aurait coûté 30 000 dollars », explique-t-il.
Toujours plus de demande
Parmi tous les avantages et inconvénients, le premier argument justifiant le fait de vendre des synthétiques est que les clients les achètent.
Pour Sehal Mody, directeur des opérations chez GoGreen Diamonds, la preuve en est les chiffres des ventes. Sa société, une division créée il y a quatre ans à partir d’un fabricant de bijoux en diamants naturels qui exerce depuis 40 ans, est passée de deux ventes par mois il y a 10 ans à des demandes de détaillants pour des vitrines complètes de synthétiques et de bijoux.
« Les détaillants recherchent des basiques pour le bridal et la mode », indique-t-il.
Or, l’essor majeur des ventes de synthétiques est venu de Lightbox. Avant l’apparition de la gamme de bijoux en synthétiques de De Beers, de nombreux commerçants hésitaient à proposer cette catégorie. Désormais, les ventes montent en flèche, comme le montre clairement le Pavillon des synthétiques en pleine expansion du JCK. À l’heure où nous rédigions, le JCK Las Vegas finissait de planifier un futur développement de la section pour 2020. Joseph Blank a déjà demandé un stand deux fois plus grand que celui de cette année.
« Lightbox a vraiment ouvert le marché », affirme Sehal Mody.
Fenix, une autre société de synthétiques, s’est servie de la réalité virtuelle sur le stand du JCK pour présenter les diamants comme une alternative offerte aux consommateurs. Au cours d’une expérience de cinq minutes, les détaillants pouvaient découvrir les processus de fabrication et de taille par eux-mêmes, la taille étant réalisée dans une usine en Inde.
« Nous ne cherchons pas à nous battre pour savoir ce qui est le mieux, explique Andrea Hansen, créateur de marque, qui a aidé Fenix dans sa campagne. Mais nous sommes équipés pour produire en gros volumes, de 30 points à 3 carats et plus. Les synthétiques pourraient dominer la sphère de la mode. »
De plus en plus gros au fil du temps
Cette hypothèse entraîne la question inévitable de savoir ce qui attend les synthétiques. Beaucoup affirment qu’il s’agira de plus gros bijoux et, bien sûr, de ventes plus importantes – même si l’ampleur de la hausse est encore inconnue.
« Le pourcentage des ventes de synthétiques pourrait n’être que de 2 % à l’heure actuelle. Mais si ces 2 % deviennent 3 %, il s’agira d’un bond de 50 % », explique Kinish Shah, propriétaire de Splendid Lab Diamonds. Avec sa société de diamants naturels, dans ce secteur depuis 27 ans sous l’égide de Surediam, il a commencé à travailler dans les synthétiques il y a trois ans.
Bien entendu, on trouve des adeptes pour les deux types de diamants, qui ont des « rêves de diamants », d’après Hiren Goti, PDG du tout nouveau SkyLabDiamond. Il dit ne pas comprendre les avis négatifs à propos des synthétiques. « Je ne sais pas pourquoi les gens sont si inquiets. Vous n’empêcherez jamais les acheteurs d’acheter ce qu’ils veulent. C’est leur choix. »
Des liens avec Lightbox
Les membres de l’équipe Lightbox de De Beers sont restés calmes sous le feu des questions au JCK Las Vegas, répondant à une salle de conférence bondée à propos des bijoux en synthétique de la société. Il y avait notamment des questions sur les individus capables de manipuler les inscriptions sur les pierres de plus de 0,5 carat pour tromper les acheteurs.
« Nous ne sommes pas là pour faire la police dans le reste de l’industrie, a expliqué Sally Morrison, directrice du marketing, mais nous pourrions peut-être collaborer avec l’International Grown Diamond Association (IGDA) pour aider à créer des références garantissant la santé globale du secteur, afin de ne pas saper la confiance des consommateurs. »
Steve Coe, PDG de Lightbox, a prononcé un discours clair sur le processus de fabrication des couleurs rose et bleu de la marque, très à la mode, proposées dans des styles de base comme des clous d’oreilles et des pendentifs.
Il a également évoqué des opportunités de cadeaux plus larges, comme ceux faits à l’occasion de la fête des 16 ans aux États-Unis, à des prix de retail allant de 200 dollars à 1 000 dollars.
En outre, les pierres ne sont pas certifiées, ce qui confirme qu’il s’agit d’un produit manufacturé comme tout autre produit de grande consommation. « Il n’y en a pas une qui soit meilleure que l’autre dans la gamme », a expliqué Steve Coe.
Dans le même temps, des femmes de tous âges et de toutes origines ethniques ont affirmé qu’elles trouvaient les bijoux attrayants et qu’elles se sentaient jolies avec, d’après des témoignages vidéo et des études de marque. Quant à l’investissement de 94 millions de dollars de Lightbox dans une installation de fabrication à Gresham, dans l’Oregon, qui devrait devenir opérationnelle début 2020, elle montre l’importance du marché américain pour l’entreprise Lightbox.