Au cours de la semaine du 14 octobre, à la demande pressante d’un commentateur, je me suis intéressé à la politique de Kay et Jared en matière de surclassement et de reprise des diamants synthétiques, maintenant que ces deux chaînes en vendent.[:] Inutile de dire que les conditions sont différentes de celles des diamants naturels. Voici les conditions de Jared :
« Nos services de reprise et de surclassement des diamants vous permettent de nous apporter tous les bijoux en diamants (à l’exclusion des diamants synthétiques) que vous ne portez plus et de les échanger contre un bijou neuf. »
Le site de Kay contient des conditions similaires. Il en va de même de l’un des plus gros vendeurs en ligne de synthétiques, Brilliant Earth.
Diamond Foundry, fabricant de synthétiques, a toujours mis en avant sa garantie à perpétuité sur 100 % de la valeur, laquelle « garantit la valeur de vos diamants pour toujours », avec un « surclassement gratuit à vie ». À l’heure où nous rédigions, le JCK n’avait pas pu retrouver la mention de cette garantie sur le site. La société n’a pas répondu aux demandes de commentaires sur la situation actuelle des garanties. (Dernière minute : à la suite de la publication de cet article, Diamond Foundry nous a écrit par e-mail qu’elle « proposait toujours » la garantie mais que le site « était plutôt axé sur les ventes B2B pour l’instant, de sorte que les conditions n’étaient pas actuellement stipulées. »)
La question est épineuse dans le monde des synthétiques. Comme les coûts de la technologie baissent au fil du temps et que la production de synthétiques n’est pas limitée par la nature, beaucoup considèrent que leurs prix vont chuter. En réalité, ce processus a déjà commencé. Les prix ont baissé l’année dernière, malgré un boom évident de la demande. (Les prix des diamants naturels ont eux aussi baissé ces derniers temps, mais pas autant.) En décembre dernier, Diamond Foundry avait annoncé qu’elle positionnait ses diamants à 55 % en dessous de la liste Rapaport. Un fournisseur vient juste de me contacter sur LinkedIn, en me promettant des prix de 78 % à 89 % en dessous de la liste.
Les prix du retail reculent aussi. L’analyste Paul Zimnisky estime qu’ils ont chuté de 20 % à 30 % en moyenne depuis le début de l’année. En janvier, un synthétique J SI2 Very Good de 2,01 carats, assorti d’un rapport de l’IGI, s’est vendu 6 800 dollars sur Brilliant Earth. Vous pouvez maintenant trouver sur le site des synthétiques ayant les mêmes caractéristiques dans la gamme des 4 000 dollars.
Ceci pourrait expliquer pourquoi certains vendeurs se montrent frileux à propos des reprises. Ce n’est pourtant pas le cas de tous.
Ada Diamonds et MiaDonna proposent des surclassements sur des synthétiques, même s’ils exigent de l’acheteur qu’il dépense un certain prix pour la nouvelle pierre – une fois et demie dans le cas d’Ada et deux fois dans le cas de MiaDonna. Cela n’est pas inhabituel, de nombreux vendeurs traditionnels appliquent des politiques similaires.
Et même si ce cas semble constituer une exception, Kesslers Diamonds, une chaîne du Wisconsin, propose la même politique de reprise pour les synthétiques et pour les diamants naturels, sans aucun montant minimum.
Si ces approches semblent partir dans toutes les directions, elles mettent le doigt sur une question plus vaste : les synthétiques ont-ils une valeur de revente ? De nombreuses personnes du secteur des diamants naturels maintiennent que ce n’est pas le cas.
Il existe bien un marché secondaire pour les synthétiques mais il est réduit. (Ce qui est logique, car la catégorie elle-même est limitée). Ada Diamonds applique un programme de rachats depuis mai 2018. Cette année, a eu lieu le lancement d’un site assez mystérieux, intitulé We Buy Lab Diamonds. Et, bien entendu, vous pouvez aussi vendre n’importe quoi sur eBay.
Lindsay Reinsmith, fondatrice et directrice des ventes d’Ada, affirme que son programme de rachats a trois objectifs. Tout d’abord, Ada est spécialisée dans les synthétiques de couleur et de pureté supérieures, des articles qui restent difficiles à trouver. Deuxièmement, comme les joailliers traditionnels, elle obtient de meilleurs prix sur les diamants d’occasion. Enfin, et plus précisément pour le marché des synthétiques, elle considère qu’il s’agit d’un « avantage pour le client ».
« Si l’on garantit qu’il y aura une offre financière, la clientèle de luxe y trouve de la tranquillité d’esprit, explique-t-elle. Ils savent qu’ils n’achètent pas un produit ayant une valeur de revente nulle. »
Bien entendu, la plupart des clients ne récupèrent pas la valeur de retail complète lors des reprises mais cela vaut également pour les diamants naturels : « C’est un achat de luxe, comme une Rolls-Royce, explique Lindsay Reinsmith. Les gens doivent cesser de penser que l’article est adapté pour réaliser un placement. »
Pour l’heure, le programme de rachats d’Ada ne représente pas une grande part de son activité.
« Ce produit est assez nouveau, il n’existe pas depuis longtemps, explique-t-elle. Ces couples n’ont pas encore connu de divorces. »
Et comme la plupart des joailliers, Lindsay Reinsmith se montre sélective dans ce qu’elle achète.
« Nous n’achetons que ce que nous voudrons vendre, explique-t-elle. Nous avons récemment acquis un diamant D, VVS, de 2 carats. C’est une pierre qui se vendra très rapidement et nous avons fait une bonne offre. Si les clients présentent une pierre affreuse, ils vont avoir du mal à la vendre. »
Lindsay Reinsmith admet qu’il n’est pas aussi facile de revendre des synthétiques que des diamants naturels mais elle a l’impression qu’un marché va finir par se créer.
Pour le moment cependant, la plupart des négociants d’articles de seconde main se tiennent à l’écart, a indiqué Paul Zimnisky :
« La plupart des grands acheteurs en C2B (du client à l’entreprise) ont tendance à n’acheter que des diamants naturels. Ainsi, les grands noms de l’industrie WP Diamonds (White Pine), IIDV et Mondiamo, un partenaire de Blue Nile, n’achètent pas de synthétiques actuellement. Worthy.com, un professionnel en ligne, achète des synthétiques mais uniquement des solitaires de 2 carats ou plus. I Do Now I Don’t (Delgatto) a récemment commencé à « tester » l’achat de synthétiques mais a spécifié qu’ils n’achèteraient qu’à prix très remisés. »
Il considère qu’un « marché de la revente solide pour les diamants naturels est sans conteste l’une des meilleures façons pour l’industrie de prouver la valeur de son produit mais aussi de se différencier, non seulement des synthétiques, mais aussi d’autres produits de luxe concurrents. »
Pourtant, on ne sait pas encore avec précision si les clients s’en soucieront ou le remarqueront, étant donné que ces politiques sont généralement reléguées aux petites lignes, dans un recoin du site. Les consommateurs ont tendance à acheter des diamants en s’attendant à les garder éternellement. Et les jeunes peuvent préférer économiser un peu d’argent pour l’instant, même s’ils risquent d’en perdre par la suite.
Pourtant, lorsque je parle à des joailliers réticents à vendre des synthétiques, leur principale réserve concerne presque toujours la valeur et la façon dont ils vont gérer les reprises et les rachats. Pour certains de ceux qui proposent actuellement des synthétiques, la réponse semble claire : ils ne les rachèteront pas.