De toute évidence, l’ambiance était lugubre lors du sight de la De Beers cette semaine au Botswana, en particulier pour un mois de janvier, généralement plus enjoué. [:]La De Beers a (quelque peu) ajusté ses prix, mais pas suffisamment pour certains, étant donné la correction qui était attendue sur le brut.
Même les sightholders intégrés verticalement « comprennent qu’ils perdent de l’argent pendant leurs sights, m’a indiqué un client. La fabrication fait perdre de l’argent. Peu importe qui vous êtes et où vous fabriquez. Être sightholder, c’est un vrai jeu de dupe. »
Les cadres de la De Beers reconnaissent en privé que la filière est bloquée pour différentes raisons : réduction des délais dans les laboratoires de certification, baisse des liquidités liée à des problèmes avec les banques, des fêtes en léger retrait par rapport aux attentes générales. Selon eux, le réapprovisionnement des boutiques de détail et le Nouvel An chinois devraient offrir une poussée d’adrénaline, pour surmonter la langueur actuelle et profiter de ce qui pourrait être une bonne année.
Mais l’économie chinoise n’est pas non plus très florissante. Et si la stimulation promise n’arrive pas, que se passera-t-il ? Ce retard, même s’il est temporaire, alimente l’idée – particulièrement chez les sightholders – que les prix de la De Beers sont totalement détachés des bases du marché. Cette sensation s’accompagne de l’impression – juste ou pas – que la direction actuelle de la De Beers, voire celle du propriétaire majoritaire Anglo American, ne s’engage pas à long terme pour l’industrie. Les dirigeants veulent gagner le plus d’argent possible et passer à autre chose.
Les clients auraient refusé environ 20 % des marchandises du sight, à peu près au même niveau qu’en décembre. Mais la très grande majorité des marchandises s’est vendue. Nous assistons une fois de plus au dilemme du prisonnier chez les diamantaires. S’ils agissent seuls, les clients n’ont pas assez de poids pour faire adopter un changement. Tout le monde se plaint que la situation actuelle ne peut continuer, mais rien ne change, car les clients « craignent trop de faire marche arrière, de peur de perdre leur sight », a indiqué quelqu’un. Le système dynamique de la De Beers, qui prépare des clients en pleine attente à accepter les marchandises refusées, alimente ces craintes.
Ce qu’il faudrait peut-être, c’est un nouvel état d’esprit. L’industrie demeure une oligarchie. Elle compte des dizaines de fabricants, mais uniquement deux producteurs de brut qui génèrent de gros volumes, ainsi qu’une poignée de miniers. Les fabricants n’ont pas beaucoup d’alternatives.
Mais ils ont d’autres possibilités. « L’approvisionnement en brut n’a jamais été plus facile d’accès », explique Anish Aggarwal, associé de Gemdax, un consultant de l’industrie et courtier pour la De Beers basé à Anvers, en Belgique.
« Auparavant, les fabricants cherchaient autant que possible à s’approvisionner auprès de la De Beers – ils considéraient cela comme un facteur clé de rentabilité, explique-t-il. Cela reste intéressant mais les fabricants adoptent une approche de portefeuille qui permette de s’approvisionner, d’acheter du brut en plusieurs endroits. Ils ne veulent pas dépendre d’un fournisseur unique. »
Au fil du temps, « cela assurera un meilleur équilibre dans la relation fournisseur-client, une chose qui n’existait pas avant dans l’industrie », explique-t-il.
Cela pourrait impliquer de ne pas réfléchir en termes de partenariats, de relations, de prestige, de politique, de ne tenir compte d’aucun des éléments traditionnels de l’état d’esprit des diamantaires. Car la De Beers ne le fait pas. À une époque aujourd’hui révolue, les cadres de la DTC auraient pu parler de partenaires sightholders et de relations basées sur des « objectifs partagés ». Cela valait à l’époque, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Dans des commentaires récents, Philippe Mellier, le PDG de la De Beers explique clairement que la société se concentre uniquement, et sans faire de sentiments, sur l’optimisation des bénéfices. Ses clients devront faire de même.