La remise au goût du jour de l’estampille CanadaMark par Dominion Diamond Corporation a pour but de mettre en valeur le statut de la société, celui de premier minier de diamants au Canada.[:] Même si CanadaMark est un programme essentiellement B2B (commerce entre entreprises), qui complète les marques des fabricants et des détaillants, Dominion espère qu’elle permettra de créer un premium sur sa production de brut, exclusivement canadienne.
« Le programme CanadaMark, c’est l’engagement de la société envers le marketing de catégorie pour les diamants canadiens », a expliqué Robert Gannicott, le président directeur général de Dominion, dans un communiqué de presse de mai 2014, avant de dévoiler cette estampille lors du salon JCK Las Vegas en juin. Dominion a racheté CanadaMark en 2013, dans le cadre de l’acquisition de la mine Ekati à BHP Billiton, son créateur. « Grâce à ce programme, [Dominion] entend souligner la bonne gérance environnementale et la responsabilité sociale à long terme de l’industrie minière canadienne. Au final, cela permettra d’obtenir les meilleurs prix pour la production diamantaire de la société », a ajouté Robert Gannicott.
Les revenus directs que la société retire du programme sont assez modestes. Actuellement, seules 13 sociétés sont des fabricants approuvés CanadaMark. Dominion espère doubler ce chiffre d’ici la fin de l’année. La société estime que près de 200 000 diamants ont été certifiés CanadaMark, y compris sous la houlette de BHP Billiton ces 10 dernières années.
James Pounds, le président de Dominion, a expliqué à Rapaport News que les fabricants approuvés règlent des frais annuels minimes pour obtenir leur licence. Il a ajouté que la société pourrait bientôt rétablir les frais qui étaient précédemment facturés pour l’émission de chaque certificat.
Pourtant, le programme n’a pas pour objet de générer des revenus supplémentaires pour Dominion. La société compte plutôt sur les très belles opportunités marketing qui se présentent aux marques qui utilisent les diamants CanadaMark. Cela stimulerait ensuite la valeur de sa propre production de brut.
Dominion prend donc d’infinies précautions afin de définir le programme comme une référence – un certificat d’origine, et non une marque en soi.
Bien que certaines marques, comme le programme Forevermark de la De Beers, par exemple, prétendent garantir la qualité et l’authenticité du diamant, CanadaMark vérifie simplement que la pierre a été extraite au Canada. Dominion considère que cela suffit en soi pour améliorer la réputation de ses clients fabricants et des partenaires associés dans la vente de gros et de détail.
James Pounds explique le fonctionnement du système : les fabricants qui souhaitent s’inscrire au programme passent d’abord par une procédure de vérification. Leur gestion est vérifiée par un tiers indépendant, qui s’assure que l’usine est équipée de systèmes de suivi individuels, garantissant que les diamants estampillés CanadaMark ne soient pas mélangés à une autre production. L’usine doit aussi disposer d’un équipement permettant d’inscrire le logo CanadaMark et un numéro de série unique sur le rondiste des pierres.
Dominion ne participe donc pas au contrôle de la qualité ou à la certification du diamant CanadaMark mais il organise les systèmes qui permettent de remonter à l’origine de la pierre dans la filière – de la mine jusqu’à la boutique.
Le fabricant achète du brut à Dominion et reçoit un numéro de facture individuel, qui atteste de la mine d’origine des pierres. Lors du processus de taille, le fabricant attribue un numéro de suivi à chaque pierre lorsqu’elle est séparée du lot de brut. Une fois que la pierre est taillée, le fabricant saisit les numéros de suivi et de facture dans le système de Dominion, accompagnés des détails et des caractéristiques du diamant. Un numéro de série unique est ensuite émis par la société minière. Le fabricant inscrit le numéro au laser sur le rondiste du diamant, puis Dominion émet le certificat.
James Pounds fait remarquer que le taillé de plus de 0,30 carat est le plus adapté commercialement à CanadaMark. Des normes de qualité sont établies pour inclure les degrés de pureté I2 et plus et les couleurs M et supérieures. Il a ajouté que Dominion accepte les certifications des principaux laboratoires.
Dominion se fie donc au contrôle qualité de ses clients et à la réputation dont jouit l’industrie diamantaire canadienne.
James Pounds affirme que, depuis le lancement, il y a quelques mois, la société travaille à informer ses clients sur ce que représente CanadaMark et les avantages pour leurs entreprises. Une plate-forme d’échanges B2B en ligne, réservée exclusivement aux diamants CanadaMark, est également en cours de développement.
La seconde phase du déploiement, explique James Pounds, se concentrera sur la sensibilisation des consommateurs, principalement aux États-Unis et au Canada. Il a ajouté que les efforts destinés à fidéliser davantage de fabricants et de détaillants seraient facilités si la demande et l’intérêt des consommateurs pour le programme augmentaient.
Le message insistera sur la provenance éthique des diamants canadiens et sur le fait qu’ils sont produits selon des pratiques socialement responsables et de manière écologique. Sans aucun doute, les consommateurs recherchent de plus en plus ce type de garanties.
CanadaMark a donc refait surface à une époque où le marché envisage des directives plus larges pour la vérification des sources et l’étude du modèle approprié de chaîne de vérification. Une partie des discussions porte sur l’opportunité de soumettre les usines à des audits aléatoires post-production ou si la production peut effectivement être séparée et surveillée afin de vérifier sa source, de bout en bout.
Beaucoup prétendent qu’il est plus pratique de contrôler régulièrement les usines et les sociétés afin de s’assurer qu’elles respectent certaines normes, auquel cas la traçabilité du diamant débute à l’usine, et non à la mine. Les sceptiques, dont nous faisons partie, estiment qu’un tel système présente des failles. Les sociétés peuvent aisément adapter la documentation papier, au risque de faire ce que l’on appelle du « green washing », une mascarade écologique qui consiste à présenter un produit ou une société comme conformes à certaines normes éthiques ou environnementales, alors que ce n’est pas le cas.
Au lieu de cela, il faut, pour apporter une garantie totale aux consommateurs, un système qui permette une traçabilité complète, de la mine à la boutique. Ceci n’est possible qu’en séparant les diamants au cours de la production. L’opération permet de vérifier la source de manière fiable, mais elle est aussi commercialement logique, étant donné les premiums que peuvent et devraient obtenir des diamants provenant d’une source éthique.
La référence CanadaMark va dans ce sens.
« Nous y voyons une formidable opportunité de nous différencier, ce qui justifie les premiums sur le taillé de CanadaMark au fil du temps, a souligné James Pounds. Cette référence jouit d’une réputation particulièrement bonne auprès de la génération Y, qui est en quête d’histoires, d’authenticité et de pratiques commerciales éthiques. »
Bien entendu, le Canada n’est pas le seul pays capable de faire passer ce genre de message positif. Nous affirmons souvent ici que le Botswana n’a pas encore profité de l’opportunité de créer une marque de diamants pour le pays. Okavango Diamond Company, la société nationale, envisagera peut-être de développer une référence similaire pour améliorer la valeur des diamants produits dans le pays. La Namibie pourrait suivre une réflexion similaire, alors qu’elle négocie un nouveau contrat d’approvisionnement et de marketing avec la De Beers.
Par conséquent, le lifting apporté à CanadaMark par Dominion pourrait bien servir de banc d’essai pour l’industrie, s’agissant de la seule initiative à utiliser actuellement un certificat d’origine d’extraction pour améliorer la valeur du produit. Dominion considère que ses clients pourront obtenir un premium sur leur taillé s’ils mettent en avant l’histoire du Canada et que cela peut, ensuite, permettre d’augmenter les prix de son brut. Les marques de diamants des sociétés minières affichent un objectif similaire. L’industrie va donc devoir surveiller l’effet que peut avoir ce marketing des catégories, de même que la capacité de Dominion à exploiter le potentiel des diamants qui ont été fabriqués au Canada, grâce à une référence rajeunie.