Pour une société qui affirme vouloir augmenter la transparence dans l’industrie de la joaillerie, il a toujours été difficile d’obtenir des réponses de Brilliant Earth sur son système de suivi.[:] Il y a quelques années, j’ai demandé un entretien à ce sujet au détaillant sur Internet basé à San Francisco, entretien qui m’a été refusé. (Rien qu’hier, Blue Nile a également refusé de me parler de son programme diamantaire canadien.) Le négociant de diamants Ira Weissman avait rencontré les mêmes difficultés avec ses questions à Brilliant Earth. Une société d’extraction minière m’a également affirmé ne pas avoir reçu de « réponses satisfaisantes » aux questions posées.
Mais aujourd’hui que les déclarations en matière d’approvisionnement de Brilliant Earth ont été publiquement remises en cause – la vidéo en première page de Reddit de la semaine du 24 avril a été suivie d’un article aussi sceptique dans The Next Web –, Brilliant Earth a accepté que son commissaire aux comptes réponde aux questions.
SCS Global Services est une société californienne créée il y a 32 ans, spécialisée dans la certification indépendante des prétentions en matière de responsabilité sociale et environnementale. C’est également l’un des commissaires aux comptes auxquels fait appel le Responsible Jewellery Council (RJC). L’année dernière, SCS et Brilliant Earth ont mis sur pied un protocole de suivi des diamants, que Brilliant Earth prévoit de publier sur son site.
Le protocole stipule le type d’étapes attendues pour une chaîne de responsabilités. En réalité, il s’appuie sur le travail du RJC dans ce domaine. Parmi ces étapes, citons :
– Le fournisseur doit disposer d’un système appuyé par une procédure de « due diligence » documentée, visant à s’assurer que les diamants Brilliant Earth proviennent de pays d’origine approuvés par la société (Botswana DTC, Canada et Russie).
– Le fournisseur doit appliquer une procédure d’achat et d’approvisionnement standardisée et proposer une description des modes d’approvisionnement utilisés.
– Brilliant Earth devra conserver une documentation étayée à propos de la provenance des diamants. La société devra, au minimum, fournir les reçus du brut pour un échantillon de tous les diamants achetés.
L’année dernière, SCS a audité les fournisseurs de Brilliant Earth à l’aune de ce protocole. « Nous sommes en mesure de confirmer que les fournisseurs [audités] appliquent les processus établis pour étayer les déclarations d’origine », m’a expliqué Nicole Munoz, directrice générale de SCS pour les certifications et services de développement durable écologique.
Ceci dit, le programme de vérification indépendante de Brilliant Earth n’en est encore qu’à ses prémices. Ainsi, la plupart de ses fournisseurs (mais pas tous) ont été vérifiés. Les contrôles n’ont pas été réalisés sur place, ils ont été effectués au moyen de documents administratifs. Il n’y a pas eu non plus de visites surprises.
En outre, le processus d’audit n’a débuté qu’en novembre. Alors, comment les choses se passaient-elles avant ? SCS n’a pas pu s’exprimer sur ce sujet mais « tous les éléments montrent que la [provenance] est une chose que les fournisseurs prenaient très au sérieux », explique Stanley Mathuram, vice-président de SCS pour les opérations de services de certification environnementale et les ventes d’entreprise.
Par conséquent, il semble d’une part que Brilliant Earth en fasse plus que la plupart des sociétés pour retracer l’origine de ses diamants. Mais c’est logique, la garantie de la source reste son principal argument de vente. D’autre part, son programme de vérification indépendante n’en est encore qu’à ses débuts même si, pour être tout à fait juste, tous ces programmes s’articulent autour de l’idée d’une amélioration continue.
Notons surtout que les fournisseurs de Brilliant Earth, du moins si l’on s’en tient aux réponses que ses employés ont maintenant apportées à deux interlocuteurs différents, ne coopèrent pas totalement. Étant donné que c’est la conformité des fournisseurs qui va, au final, permettre que les systèmes existants soient validés ou éliminés, c’est évidemment une chose sur laquelle Brilliant Earth doit travailler si elle veut continuer à faire de telles affirmations.
Il serait également utile que Brilliant Earth fournisse à ses clients plus de détails sur les modes de suivi de ses diamants. J’ai été très surpris de voir qu’elle ne proposait qu’un certificat d’origine canadienne global pour tous ses produits. Il est certain que maintenant, les acheteurs voudront davantage d’informations de fond. Les consommateurs pourraient même apprécier d’en savoir plus sur le processus.
Enfin, il est possible que cette disposition devienne bientôt caduque. Comme l’a annoncé le président du World Diamond Council au cours de la semaine du 1er mai, des solutions technologiques sont en cours de développement pour assurer le suivi des diamants, de la mine jusqu’à la pierre taillée. (SCS affirme s’intéresser également à ce sujet.) Une nouvelle grande initiative, allant dans ce sens, sera présentée au salon JCK le mois prochain. C’est une très bonne nouvelle pour l’industrie, un peu plus mitigée peut-être pour Brilliant Earth. Un système de suivi solide, basé sur la technologie, éliminera les difficultés qu’elle rencontre actuellement. Mais, en supposant que cette technologie soit jugée crédible et soit largement diffusée, elle pourrait anéantir son principal aspect distinctif. Si votre mission consiste à accroître la transparence de l’approvisionnement, que se passera-t-il lorsque ce problème sera résolu ?