National Jeweler s’entretient avec deux analystes sur la part de marché de ce secteur et sur l’avenir de ces pierres.
Bien que les diamants synthétiques continuent de représenter un faible pourcentage du marché global des bijoux en diamants, leur importance s’accroît.
La catégorie a lentement grignoté des parts de marché, à mesure que la production s’est accélérée et que les consommateurs ont opté plus souvent pour une pierre synthétique. Le marché américain s’établit comme le plus important à ce jour pour ce type de produit.
Afin de contextualiser la taille actuelle du marché et ses perspectives à court terme, National Jeweler s’est entretenu avec les analystes indépendants Edahn Golan et Paul Zimnisky.
Tous deux ont exploité leurs propres recherches et analyses pour obtenir les données communiquées ci-dessous, qui s’appuient sur leurs estimations et leurs prévisions.
Une courbe montante
Si l’on observe le marché ces cinq dernières années, une courbe de croissance intéressante se profile.
Avant 2018, les ventes de bijoux en diamants synthétiques totalisaient moins d’un milliard de dollars, soit moins de 1 % du marché mondial des bijoux en diamants, d’après Paul Zimnisky. (Bien que ces chiffres soient mondiaux, Paul Zimnisky a fait remarquer que les États-Unis représentent la majeure partie du marché, avec plus de 90 %.)
Les estimations d’Edahn Golan pour 2018 placent les diamants synthétiques à moins de 1,5 % de toutes les ventes de diamants des détaillants spécialisés aux États-Unis.
L’année suivante, ce chiffre était monté à plus de 2 %, a-t-il affirmé, et il a continué à monter, notamment parce que davantage de producteurs, comme De Beers et sa marque Lightbox, ont adopté un système de commerce en ligne.
En 2020, la part de marché de ces pierres était passée à environ 3,5 %. L’année dernière, elle approchait des 5 %, signe d’une augmentation constante de la sensibilisation des consommateurs et de l’acceptation du produit, a déclaré Edahn Golan.
Dans l’ensemble, selon Edahn Golan, les diamants synthétiques ont représenté une activité de 3,9 milliards de dollars aux États-Unis en 2021.
Les estimations de Paul Zimnisky sont plus optimistes.
Ses recherches indiquent qu’en 2021, les ventes mondiales de bijoux en diamants synthétiques ont totalisé environ 5,9 milliards de dollars, soit 7 % à 8 % du total du marché des bijoux en diamants.
D’après ces deux experts, il ne fait aucun doute que le marché des diamants synthétiques va continuer de croître, notamment lorsque les producteurs augmenteront l’offre et que les grands détaillants, comme Signet et Pandora, continueront d’étoffer leur stock de diamants synthétiques.
« Toutes choses étant égales par ailleurs, une part de 7 % en 2022 n’est pas un scénario impensable », a déclaré Edahn Golan.
Paul Zimnisky a quant à lui déclaré que les ventes de bijoux en diamants synthétiques pourraient approcher ou dépasser les 8 milliards de dollars en 2022, soit environ 10 % du marché des bijoux en diamants, et frôler le repère des 10 milliards de dollars d’ici 2023.
Bijoux de bridal ou de mode ?
L’une des principales discussions relatives aux diamants synthétiques consiste à déterminer quel usage en sera fait par les consommateurs. Les choisiront-ils pour des bijoux de bridal ou des bijoux de mode ?
Actuellement, près de 60 % des ventes de diamants synthétiques en valeur chez les bijoutiers spécialisés concernent le bridal, d’après Edahn Golan. Pour lui, cela est principalement dû au prix supérieur des bagues de fiançailles par rapport aux bijoux de mode.
Mais si l’on observe les parts de marché en nombre d’unités vendues (volume), le bridal et la mode sont à égalité, a-t-il déclaré.
Edahn Golan a également remarqué que le ratio des ventes de diamants synthétiques dans les grands espaces de retail, comme Macy’s ou Amazon, est très différent car, chez ces détaillants, les clients achètent plus de bijoux de mode que de bridal. Il rappelle qu’aux États-Unis, les bijoux de bridal en diamants synthétiques n’occupent pas une place aussi importante.
Paul Zimnisky a affirmé que même si le marché des diamants synthétiques s’est principalement établi dans le secteur du bridal, il devrait prendre davantage de place dans les bijoux de mode dans les années à venir.
« Pour moi, les achats personnels devraient devenir le plus gros segment de ce marché. Et une large part de celui-ci revient aux bijoux de mode », a-t-il déclaré, ajoutant que de grosses sociétés comme Pandora et Lightbox se positionnent aussi comme créateurs de produits de mode.
Les prix pourraient également influencer cette tendance potentielle, a-t-il déclaré.
Comme les tarifs des diamants synthétiques baissent – et ce depuis quelques années maintenant –, il est probable qu’ils soient de plus en plus commercialisés en tant que bijoux de mode.
Les prix et leurs effets
Les prix des diamants synthétiques ont chuté l’année dernière, tandis que ceux des diamants naturels taillés ont progressé d’environ 30 %, a estimé Paul Zimnisky, ce qui a creusé l’écart entre les deux catégories.
L’amélioration des procédés des fabricants et la concurrence croissante entre les grossistes provoqueront une baisse continue des prix, ont convenu les deux analystes. Reste à savoir à quel niveau plancher se fixeront les prix des diamants synthétiques.
Pour l’instant, les diamants synthétiques génériques affichent un prix jusqu’à 75 % à 85 % inférieurs à ceux des diamants naturels de la même qualité, a précisé Paul Zimnisky.
Selon lui, les diamants synthétiques devraient atteindre des prix similaires à ceux de Lightbox, dont le système de tarification linéaire est basé sur la grosseur (800 dollars pour un diamant d’un carat, 400 dollars pour un diamant d’un demi-carat, etc.)
Cet élargissement de l’écart des prix contribue également à se poser une question importante : les diamants synthétiques prennent-ils des ventes aux diamants naturels ?
Il y a à peine quelques années, lorsque les diamants synthétiques coûtaient de 10 % à 15 % moins cher que les diamants naturels comparables, « presque toutes ces transactions se faisaient probablement au détriment des ventes de diamants naturels », a-t-il déclaré.
Mais aujourd’hui que l’écart de prix s’est élargi, il est probable que de nombreux consommateurs qui achètent un diamant synthétique n’envisagent pas d’acheter un diamant naturel de la même qualité car le prix est bien supérieur. Autrement dit, les diamants synthétiques pourraient trouver une nouvelle clientèle.
Toutefois, en fin de compte, la part de marché et la croissance dépendront d’un aspect important, comme en ont convenu les deux analystes, et il s’agit du marketing.
« Cela reste un produit de luxe. Il s’agit d’un achat émotionnel, que les clients réalisent car ils aiment les sensations qu’il leur procure. Et je pense que c’est là que le type de marketing entre vraiment en jeu », a déclaré Paul Zimnisky.
« Je pense que l’industrie des diamants naturels peut réellement se protéger si elle réussit son marketing. Dans le cas contraire, le risque est sérieux selon moi. »