Qu’est-ce qu’un diamant naturel s’il n’a pas d’objectif social ? Nous allons poser à la plus grande marque cette question qui fâche : « Que défendent vraiment De Beers et sa marque Forevermark ? » La réponse pourrait vous inspirer.
Il y a 30 ans, l’idée même qu’un diamant naturel représente un gage d’amour ultime suffisait à la plupart des consommateurs. Internet et les réseaux sociaux n’existaient pas. Les produits et les marques n’avaient pas besoin de se justifier. Les consommateurs avaient confiance dans la plupart de leurs allégations.
Les jeunes consommateurs de bijoux en diamants naturels d’aujourd’hui, ceux des générations Y et Z, tiennent davantage en estime l’honnêteté et l’intégrité que les précédentes générations, ils sont également plus soucieux des personnes. Ils recherchent ce en quoi ils peuvent avoir confiance et ils ont confiance dans les marques dans lesquelles ils croient, auxquelles ils s’associent, qu’ils ont appris à connaître. Ils veulent être sûrs que leur achat de luxe non seulement n’a pas nui mais qu’il a fait le bien. Ils veulent s’assurer que, dans l’environnement actuel, soucieux du développement durable, leurs amis soient en phase avec le fait qu’ils portent des diamants. Ils ne sont pas uniquement conscients sur le plan social, ils sont de plus en plus intéressés par le « glocal » : le monde commercial est global mais il est aussi local (Les artisans « locaux » ont-ils reçu un salaire équitable ? Quelles sont leurs conditions de travail ?). Les jeunes consommateurs posent ces questions : « Quel est votre but, quel est votre objectif social ? Comment faites-vous le bien ? » Ils vont créer un lien émotionnel avec une marque affichant un objectif social évident… Le contraire est également vrai, bien entendu.
Il y a deux semaines à peine, le créateur de la marque de brasserie écossaise Brewdog a annoncé un projet visant à développer une partie du domaine de Kinrara, de plus de 40 km², qu’il a récemment acquis en Écosse, pour en faire le plus gros projet de création d’une forêt naturelle et de restauration de tourbières du Royaume-Uni. Pour chaque pack de bière Brewdog acheté, la société plante un arbre… Au final, ce seront des millions d’arbres natifs qui vont être replantés. La « forêt perdue » de Brewdog devrait finalement être en mesure de capter 1 million de tonnes de dioxyde de carbone de l’atmosphère. Le complexe comprendra également un hôtel « vert », un camping durable, etc. dont le but sera d’aider les gens à se reconnecter à la nature… le tout venant d’une société de brassage de bière. Pourquoi ? Parce que les sociétés qui réussissent admettent qu’aujourd’hui, l’objectif social et le développement durable sont essentiels dans tout ce qu’elles font, tout comme ils sont essentiels dans tout ce qui concerne les marques à succès. De l’environnement de travail à la façon dont chaque employé vit, travaille, mange, dort et respire. Du réceptionniste à la personne chargée du ménage, en passant par le chauffeur et le commercial, jusqu’au PDG, tous portent les valeurs que revendique la société et/ou la marque. Au final, c’est également bon pour les affaires.
Certaines sociétés minières n’ont pas encore relevé ce défi. Beaucoup donnaient la priorité aux rendements sur la production (à court terme) pour les actionnaires, en restant de bons employeurs, avec de bonnes conditions de travail et la gestion des conséquences sur l’environnement en conformité avec les règles strictes qui s’appliquent. Une grande partie de leur contribution aux communautés d’accueil se fait par l’emploi, les impôts (dans certains pays, les taux d’imposition sont quasiment punitifs), l’externalisation locale, la montée en compétences et la formation. Certaines sont allées plus loin, par exemple en faisant des dons à des projets éducatifs locaux et à des initiatives pour les petites entreprises locales. Or, dans cet environnement professionnel, les actionnaires conservent la primauté absolue par rapport à d’autres acteurs. Trop souvent, la responsabilité environnementale et sociale et le développement durable apparaissent comme des « ajouts », des actions à engager pour cocher les cases ou parce qu’il s’agit d’une exigence réglementaire qui doit figurer dans le rapport annuel. Pour les sociétés d’extraction de diamants en particulier qui, après tout, n’extraient pas une nécessité industrielle maiss L’article de luxe ultime, si le développement durable ne devient pas une valeur essentielle, concrétisée par des actes, des problèmes risquent de se profiler à l’horizon… Car, pour ce produit de consommation ultime, le consommateur est déjà à l’affût.
Comment les diamants se positionnent-ils ? Heureusement, en règle générale, l’extraction des diamants a un très faible impact environnemental. D’une part, les mines sont rares dans le monde, d’autre part, l’extraction ne nécessite pas de produits chimiques pouvant avoir des effets permanents sur l’environnement.
S’il y a bien une société de diamants à mettre au défi, ce serait De Beers et sa « marque Forevermark ». Que ce soit dans l’extraction de diamants ou dans le branding, elles sont sans conteste les acteurs les plus importants qui s’impliquent à toutes les étapes de la filière diamantaire, de la mine jusqu’à la boutique. Pour tout vous dire, j’ai quitté De Beers il y a 20 ans mais pour que cet article soit totalement objectif, j’ai décidé de ne m’entretenir avec personne sur place. Voici donc les questions posées : « Derrière tous les slogans d’entreprise et les discours de relations publiques, que défendent-ils vraiment ? Quel est leur objectif social ? »
L’industrie admet globalement que De Beers est un leader dans le fait de mettre en avant les bonnes pratiques. Cette case est cochée. On admet également qu’au cœur de ses opérations d’extraction et de vente, figurent une extraction responsable, des pratiques de travail justes et équitables, des références environnementales et un approvisionnement éthique de premier ordre dans l’industrie, etc. Nouvelle case de cochée. Tout cela est formidable, mais un critique pourrait affirmer, très raisonnablement : « N’est-ce pas ce que n’importe quelle entreprise devrait faire de toute façon ? » C’est exact, aussi injuste que cela puisse paraître, maintenant que nous avons coché ces cases, nous pouvons nous arrêter à : « Nous sommes heureux que vous fassiez ce que nous espérions que fasse n’importe quelle industrie » et passer à autre chose. Mais il existe une meilleure question à poser : cela va-t-il suffire aux nouveaux consommateurs d’aujourd’hui ?
Depuis au moins 50 ans, De Beers s’est fait le champion de la préservation de toutes ses opérations minières.
Non, cela ne va pas suffire mais si vous creusez pour de bon, les choses deviennent assez intéressantes. Lorsque vous achetez un diamant Forevermark de De Beers, extrait, disons à la mine Jwaneng au Botswana, vous n’achetez pas uniquement un diamant d’extraction responsable. Ce petit enfant qui sourit en jouant dans la cour de son école à Jwaneng, si lui et ses amis sont heureux, en bonne santé et s’ils reçoivent une bonne éducation, s’ils peuvent compter sur un avenir avec de vraies opportunités, c’est probablement dû au fait que leur père et/ou leur mère occupent un emploi très qualifié, direct ou indirect, à la mine de diamants. Contrairement à tant d’autres personnes en Afrique, ces enfants profitent d’une véritable chance dans la vie, et pour une seule raison : parce que vous venez d’acheter un diamant. Comment ne pas être heureux d’un tel achat ?
Il suffit de regarder ce que les diamants ont permis au Botswana. Ce pays était l’un des plus pauvres au monde lorsque, dans les années 60, De Beers a découvert des diamants à la limite du désert du Kalahari. Aujourd’hui, c’est un pays aux revenus intermédiaires, probablement le meilleur exemple de bonne gouvernance dans toute l’Afrique. Et tout cet argent est issu des diamants.
Mais en ce qui concerne De Beers, la société s’est transformée. Désormais, son ADN ne se limite plus aux contributions pour les membres des communautés au sein desquelles elle évolue, le minier va beaucoup plus loin. Si l’on considère les diamants naturels comme un miracle de la nature, il faut protéger le monde naturel d’où ils proviennent. Depuis au moins 50 ans, De Beers s’est fait le champion de la préservation de toutes ses opérations minières.
Aujourd’hui, pour chaque hectare de terre altéré par l’extraction, la société assure la gestion de six hectares, dans le seul but de les préserver. Ses actions visant à protéger certaines espèces en danger font un récit assez inspirant.
Traqués par la convoitise apparemment insatiable du marché asiatique pour les produits en ivoire, les éléphants sont de plus en plus menacés partout en Afrique, le plus souvent du fait du braconnage. Il y a un siècle, la population des éléphants d’Afrique était estimée à 12 millions d’individus. Aujourd’hui, ils sont moins de 400 000 et 20 000 sont massacrés chaque année pour leur ivoire. À certains endroits, en revanche, ils sont trop nombreux. Mais dans de trop nombreuses régions, la population d’éléphants a été décimée par le braconnage, malgré leur importance cruciale pour le développement durable des pays d’Afrique, en lien avec l’écotourisme. Au-delà de cela, dans quel monde vivrions-nous s’il n’y avait plus d’éléphants ?
Je me rappelle m’être rendu à la mine Venetia de De Beers en Afrique du Sud, peu après son ouverture officielle en 1992. À l’époque, six éléphanteaux orphelins venaient d’être remis en liberté dans la réserve animalière de 32 000 hectares qui entoure la mine. Aujourd’hui, cette réserve accueille des lions, des guépards, des léopards, des lycaons, des girafes et différents types d’antilopes… Mais un problème persiste, et de taille. De Beers a si bien réussi à protéger les éléphants que 270 de ces formidables géants vivent maintenant dans une région qui ne peut en accueillir, sur le plan écologique, qu’entre 60 et 70. Un trop grand nombre d’éléphants dans un espace restreint finit par détruire l’habitat naturel et mettre en danger la vie de tous les éléphants, mais également des autres animaux que l’on essaie de protéger. Avant cela, dans d’autres réserves animalières, lorsqu’un trop grand nombre d’éléphants menaçaient de détruire l’habitat, des chasseurs étaient amenés sur place et, en échange de fortes sommes d’argent, eux et leurs invités étaient autorisés à abattre des individus. L’argent était, il faut l’espérer, réinjecté dans les aides au développement des communautés locales. Mais lorsque l’on se soucie de la nature, l’abattage paraît totalement inadéquat, à l’heure où les éléphants doivent être protégés.
De Beers s’est alors lancée dans un projet extraordinaire. Le minier a organisé le transport de 200 éléphants à 1 700 km de la mine Venetia, à travers l’Afrique, jusqu’à une zone sécurisée du parc national Zinave, dans le Mozambique voisin. Le parc national Zinave couvre 400 000 hectares mais au terme de dizaines d’années de guerres et de braconnage, seuls huit éléphants demeuraient sur place. Faire partie d’une industrie où une société minière transporte des éléphants à travers l’Afrique pour aider les populations du pays voisin à rebâtir leur écotourisme et le secteur associé à la vie sauvage est particulièrement étonnant. Et ce n’est pas comme s’il s’agissait de conduire sur une autoroute du monde occidental, ces routes traversaient l’Afrique rurale ! Je dirais que ceux qui ne seraient pas émerveillés par cet exploit sont probablement mesquins et des personnes qu’il vaut mieux éviter… Mais au-delà de cela, ils ont fait ce qu’ils devaient faire.
Au Botswana, De Beers et le gouvernement du pays, auquel elle est associée, sont les plus grands éleveurs et protecteurs du rhinocéros blanc, des animaux exterminés pour les propriétés soi-disant aphrodisiaques de leur corne. Combien de personnes savaient, lorsqu’elles ont acheté un diamant Forevermark de De Beers, qu’elles contribuaient à donner à leurs petits-enfants une chance infime de pouvoir observer l’un de ces animaux rares et majestueux dans leur milieu naturel ?
Mais le développement durable nécessite également de protéger l’environnement dans lequel vous évoluez et les jeunes consommateurs de diamants sont plus que conscients qu’ils vont devoir gérer l’impact des dégâts infligés à la planète par les précédentes générations. Peut-être cela explique-t-il pourquoi beaucoup d’entre eux sont prêts à changer de lieu d’achat si cela réduit leur impact environnemental.
La protection des espèces en danger est une part essentielle de l’ADN de De Beers, à l’instar de la protection de l’environnement. Les diamants naturels sont en effet intrinsèquement liés à la nature.
Un critique des diamants naturels sur le plan écologique se contenterait probablement de signaler que pour extraire un diamant, d’importantes excavatrices sont nécessaires pour creuser un grand trou dans le sol, un trou qui ne disparaîtra pas, ce qui est à proscrire. La réponse à cet argument est double. Tout d’abord, en matière d’extraction et de transformation, De Beers s’est engagée à ce que sa prochaine mine soit neutre en carbone. Il est généralement admis que la société fait partie d’un groupe qui est une force leader dans le monde de l’extraction, sur la voie d’un objectif de zéro émission de carbone. Le groupe est étroitement lié au développement innovant d’énergie à l’hydrogène verte. C’est formidable ! Mais ce même critique pourrait alors répliquer que non seulement un trou géant a été créé mais qu’une fois le diamant naturel extrait du minerai de kimberlite concassé (la roche qui abrite les diamants), ce minerai concassé doit être déposé quelque part… sous la forme d’un énorme tas. Un tas très bien structuré, bien entendu, mais qui reste un tas. Comment peut-on justifier cela ? En réalité, c’est assez facile, mais prenons un peu de recul pour en comprendre les raisons.
Seul 1 % de la roche sur terre est appelée roche « ultramafique », ce qui signifie qu’elle absorbe et capture naturellement de grandes quantités de dioxyde de carbone. La kimberlite est l’une de ces roches ultramafiques mais évidemment, uniquement lorsqu’elle est amenée à la surface. Mieux encore, une fois qu’elle a été concassée lors du processus d’extraction des diamants, sa surface est considérablement augmentée, ce qui accroît sa capacité à capter les émissions de façon exponentielle. C’est la raison pour laquelle, en 2016, De Beers a commencé à piloter un projet en partenariat avec plusieurs universités internationales afin d’étudier la capacité de la kimberlite à capturer le carbone. Les premières recherches semblent suggérer que toutes les émissions de dioxyde de carbone provenant d’une mine de diamants ordinaire n’occuperaient que 10 % du stockage total de la roche, ce qui laisserait 90 % de disponibles pour absorber d’autres émissions de carbone. Autrement dit, lors du percement de ce trou, d’énormes quantités de roche sont extraites et peuvent alors absorber des émissions de carbone, bien au-delà de ce qu’elles risquent de produire. Ainsi, lorsque vous achetez un diamant naturel, il est presque certain que vous aidez la planète.
Greta Thunberg ou votre futur mari ou partenaire ferait mieux de vous acheter un diamant naturel… ou autre !
Mais ce n’est pas tout. Il existe une autre valeur essentielle que défendent De Beers et Forevermark : les femmes et les droits des femmes. Il est vrai qu’ils ne sont pas les seuls. Comme l’a indiqué Hillary Clinton, ancienne secrétaire d’État américaine : « Je pense que les droits des femmes et des filles représentent le dossier inachevé du XXIe siècle » mais cela reste la bonne chose à faire. Il y a environ 70 ans, Marylin Monroe lançait la chanson emblématique Diamonds are a Girl’s Best Friend dans le film à succès de 1953, Les hommes préfèrent les blondes. Ce titre pourrait fâcher de nombreuses personnes aujourd’hui mais De Beers a repris ce leitmotiv pour lui donner un sens tout à fait nouveau, dans le contexte du monde actuel. Les diamants naturels ne peuvent pas être simplement les amis des femmes qui veulent porter des bijoux en diamants. Ils doivent être les meilleurs amis de chaque femme concernée par les diamants naturels, dès l’instant où ils sont extraits, jusqu’à celui où ils sont achetés, sertis sur des bijoux raffinés. Pour cela, ils se sont concentrés sur l’autonomisation et la création d’opportunités pour les femmes dans chaque section de leur activité, ce qui est particulièrement important dans une industrie historiquement dominée par les hommes. En 2018, ils ont rejoint le programme des Nations unies intitulé HE4SHE qui présuppose que les hommes doivent faire partie de la solution pour l’autonomisation des femmes, et non faire partie du problème. Leur engagement envers les Nations unies était d’atteindre la parité d’ici 2020.
Les diamants naturels ne peuvent pas être simplement les amis des femmes qui veulent porter des bijoux en diamants. Ils doivent être les meilleurs amis de chaque femme concernée par les diamants naturels…
Les diamants naturels apportent une énorme contribution financière, environnementale et sociale aux pays qui ont besoin d’emplois et qui ont besoin des richesses de l’extraction de diamants naturels, pour œuvrer aux progrès de toutes les personnes de ces pays. L’histoire des diamants naturels, en particulier – mais pas exclusivement – celle de De Beers et Forevermark, est faite de contributions, notamment parce que la plupart des diamants proviennent du monde en développement et sont taillés en Inde.
C’est la raison pour laquelle l’histoire des diamants naturels est extraordinairement positive. Ils ont toujours représenté une manière unique d’exprimer exactement qui vous êtes, sans avoir à parler. Lorsque vous portez des diamants naturels, au-delà du simple symbole d’amour ultime, vous exprimez en silence tout un ensemble de valeurs. Beauté, authenticité, rareté, développement durable et contributions sociales, voilà une formidable histoire pour les diamants naturels, une histoire qui mérite d’être racontée.
Richard Chetwode dirige un cabinet de conseils dans les diamants. Il est également président du conseil de Namibian Diamond Mining Company Trustco Resources, président du comité consultatif de la société technologique australienne Fine Arts Bourse et consultant pour plusieurs entreprises diamantaires et autres. Tous les avis exprimés dans cet article sont les siens.