Le salon des diamants et des bijoux de Hong Kong, de la semaine du 12 septembre, a réjoui le marché du diamant, malgré des conditions difficiles en Extrême-Orient.[:] Dans l’ensemble, il peut être considéré comme satisfaisant puisque les échanges des négociants ont repris après un été très tranquille. Après tout, étant donné sa taille et sa date, le salon de septembre tombe à point nommé pour présager du niveau d’activité que l’on peut attendre au cours des fêtes du quatrième trimestre, période très importante.
Cela ne veut pas dire que les échanges ont été exceptionnels. Les exposants se sont plutôt rendus au salon avec des attentes basses, et ont été agréablement surpris. Les acheteurs étaient absents du marché depuis longtemps et il était temps pour eux de se réapprovisionner, a expliqué Sandeep Selot of Elements Limited, un fournisseur de mêlé.
En effet, plusieurs fabricants de bijoux ont remarqué qu’ils cherchaient à acheter des diamants après une pause prolongée.
« Nous avons limité nos achats ces deux dernières années, ce qui s’est révélé être une bonne décision, a expliqué Ephraim Zion, directeur général de Dehres Ltd, basée à Hong Kong et spécialisée dans les grandes pierres précieuses et les bijoux haut-de-gamme. Il y a ceux dont le stock est épuisé et qui envisagent d’acheter de nouveau. »
Des stocks en équilibre
Pourtant, le marché reste précautionneux et la fréquentation stable du salon ne s’est pas traduite par des ventes exceptionnelles, ont remarqué les exposants. Les acheteurs se sont montré prudents et les fournisseurs de taillé n’étaient pas prêts à baisser les prix, cherchant à protéger leurs marges face à un marché du brut dynamique.
Les grossistes et détaillants de bijoux peuvent avoir besoin de refaire leurs stocks, mais ils n’achètent plus autant qu’avant car ils se sont habitués à gérer des inventaires réduits. Le salon a montré que le niveau de marchandises dont a besoin l’industrie a baissé ces dernières années car les grands détaillants, principalement d’Extrême-Orient, ont ralenti leurs programmes d’expansion de boutiques et la demande des consommateurs stagne.
Cette réalité est apparue clairement tout au long de la chaîne de distribution, jusqu’aux sociétés minières, qui ont réduit leur production cette année. Les fabricants et négociants de diamants de la filière intermédiaire rattrapent quant à eux lentement leur retard, après avoir supporté la charge des excès de stocks de l’industrie pendant très longtemps.
Ils semblent sur la voie du progrès. L’offre et la demande sont équilibrées, les stocks sont bas et le marché est dans une situation plus saine qu’il y a un an, a assuré Lawrence Ma, président de Diamond Federation of Hong Kong, China Ltd, lors de la conférence de presse d’ouverture du salon. D’autres remarquaient que la fabrication des diamants continuait de s’accélérer avant les vacances de Diwali en Inde, à partir du 30 octobre, et que les stocks de taillé continuaient donc d’augmenter à court terme.
L’évolution de la demande des consommateurs
Les autres participants à la conférence de presse se sont montrés moins optimistes car ils représentaient les secteurs du retail et de la fabrication de bijoux de Hong Kong. Véritable indicateur de tendances pour la demande d’Extrême-Orient, le salon a révélé une incertitude constante quant aux dépenses des consommateurs en Grande Chine, même si les échanges de diamants étaient « à l’équilibre ».
L’humeur à court terme est morose et cela nuit aux dépenses des consommateurs, a indiqué à la presse Kent Wong, directeur général de Chow Tai Fook, également président du conseil de Hong Kong Jewellers & Goldsmiths Association.
Les grands détaillants hongkongais ont dû ajuster leurs stratégies pour s’adapter à l’évolution des dépenses des consommateurs. Des détaillants comme Chow Tai Fook et Luk Fook ont ouvert l’année dernière un quart du nombre de boutiques ouvertes les années précédentes en Chine continentale et à Hong Kong. En outre, ils sont liés par des contrats de location qui ne devraient pas être renouvelés dans de nombreux lieux, notamment à Hong Kong, où les détaillants de luxe sont confrontés à des baisses des ventes principalement dues à la chute récente de la fréquentation touristique.
Les arrivées de touristes ont chuté de 7,4 % au premier semestre. La fréquentation en provenance de Chine continentale a plongé de 10,6 %, d’après l’Office du tourisme de Hong Kong. Les touristes du continent ont préféré se rendre dans des destinations aux taux de change plus compétitifs, comme Londres, la Corée du Sud et Singapour, plus adaptées à leurs voyages d’achats de luxe.
Politiques et règles
Les facteurs politiques et sociaux ont également découragé les touristes du continent. « Les habitants de Hong Kong regardent généralement les Chinois de haut et n’ont pas toujours bien accueilli les touristes, a expliqué un grossiste de bijoux. Cela revient les hanter aujourd’hui. »
De l’avis général des exposants, le marché en Chine est meilleur qu’à Hong Kong. Les Chinois dépensent plus chez eux car le gouvernement poursuit son programme de réalignement de l’économie, passant d’un marché dirigé par les exportations et les investissements à un système davantage centré sur les consommateurs. Il s’agit toutefois d’un ajustement graduel et l’on peut s’attendre à une certaine volatilité de la demande chinoise à court terme, a indiqué la De Beers dans son rapport Diamond Insight publié pendant le salon.
Simultanément, la campagne anticorruption du gouvernement a obligé les consommateurs à revoir à la baisse les signes ostentatoires de richesses. Ce facteur, associé à une croissance économique qui ralentit, a incité les consommateurs chinois à acheter des articles moins chers. En règle générale, ils réduisent la grosseur plutôt que la qualité, d’après Jerrica Chua, responsable commerciale chez Brilliant Jewellery Manufacturer, un grossiste basé à Hong Kong. « Nous créons davantage de produits qui comportent moins de diamants et de l’or de moindre qualité », a ajouté un autre grossiste, spécialisé dans les bijoux de bridal.
Se développer ensemble
Pour le secteur diamantaire, la Chine reste un marché difficile à pénétrer. Le gouvernement a renforcé sa politique de transfert d’argent, entraînant des retards de paiement. La campagne anticorruption a quant à elle fait s’évaporer les liquidités. En outre, les grands détaillants de bijoux n’achètent plus autant de diamants qu’avant, après s’être laissé aller ces dix dernières années.
Toutefois, comme l’a remarqué un diamantaire indien, il existe beaucoup d’autres joailliers, disposant de 200 à 300 points de vente, prêts à faire affaires. « Pour eux, le problème ne tient pas aux prix, mais au fait de se développer ensemble », a-t-il dit.
À cet égard, le salon de septembre a montré que la région regorge toujours d’opportunités. Et surtout, il s’est révélé être une plate-forme permettant d’exploiter ce potentiel, plutôt qu’une opportunité de ventes immédiates.
« La nature des salons évolue. Les gens ne passent plus de commandes au comptoir de vente, comme ils le faisaient, mais il s’agit d’un lieu important pour nouer des liens, a souligné Arnav Mehta, un directeur de Blue Star Diamonds, fabricant de diamants. Personne n’a cherché à obtenir des rabais. Le but était plutôt de savoir comment proposer des services car les détaillants veulent trouver des manières de se différencier, avec l’aide de leurs fournisseurs. »
Personne ne s’attendait à ce que le salon de septembre soit exceptionnel. Mais le marché voulait s’assurer de la demande des négociants et de la solidité à long terme de l’Extrême-Orient, étant donné les difficultés et la volatilité actuelles. Ils ont au moins obtenu ces garanties, ce qui a permis aux diamantaires d’entamer la saison des fêtes du quatrième trimestre avec un peu plus de confiance qu’auparavant.