Plus tôt ce mois-ci, lors d’un événement organisé à Las Vegas, la Diamond Producers Association a révélé le slogan qui sera au cœur d’une nouvelle campagne publicitaire générique ciblée sur les États-Unis et la génération Y : « Real is rare. Real is a diamond. » [:]
La DPA travaille sur le nouveau slogan depuis plusieurs mois, en collaboration avec l’agence publicitaire Mother New York. Cette coopération a pris la forme d’entretiens avec un « échantillon représentatif » des consommateurs de la génération Y dans trois villes américaines : Boston, Chicago et Los Angeles. (La DPA n’indique pas le nombre exact de personnes concernées par cette enquête.)
Une fois les salons terminés, National Jeweler a pu rencontrer Stephen Lussier, dirigeant de la De Beers et président de la DPA pour parler plus en détail de la façon dont la DPA était parvenue au slogan « Real is Rare », des élections présidentielles américaines, des inégalités de revenus et de la place désormais laissée à « A Diamond is Forever. »
National Jeweler : Comment, selon vous, « Real is Rare. Real is a Diamond », pourra-t-il faire le lien avec la génération Y ?
Stephen Lussier : Je pense que les deux grands enseignements à tirer de notre enquête sont, premièrement, d’interroger le concept de relation à une époque caractérisée par un grand nombre de contacts.
Il s’agit d’une génération qui a chaque jour davantage de contacts avec davantage de personnes que ce dont la génération précédente aurait pu rêver. Bien qu’ils aient une énorme quantité de contacts, ils ont pourtant tendance à reconnaître que « eh bien, ça n’est pas vraiment suffisant. » Qu’à la différence des générations [précédentes], leurs relations n’ont pas la même profondeur. C’est un besoin humain et ils sont en quête de ce genre de lien.
Le principal enjeu consiste, en partie, à savoir reconnaître ce sentiment et s’assurer que votre produit se positionne en fonction. Et si vous parvenez à faire le lien entre votre produit et leur besoin essentiel, vous êtes en position de force.
Je pense que l’autre enseignement important issu de notre étude est qu’il existe une volonté de posséder de l’authentique. C’est un mot qu’ils ont souvent employé dans l’enquête. Ils l’ont utilisé dans de nombreux contextes différents [et] pour qualifier les relations. On dirait qu’ils savent d’instinct que le diamant est quelque chose de vrai. C’est un des rares produits dans la vie qui résiste au temps et qui dure éternellement.
L’essentiel est de lier ces deux aspects. Si nous parvenons à faire le lien entre ce sentiment inné, ce désir de relations vraies, et leur souhait de trouver des choses dans leur monde qui soient authentiques et tangibles, nous aurons une proposition très percutante.
Lorsque la DPA a réalisé son enquête, les membres de la génération Y ont-ils posé beaucoup de questions sur les diamants du conflit ou des questions générales d’ordre éthique à propos du produit ?
Peut-être pas autant qu’on aurait pu s’y attendre. Il est intéressant de noter que la principale question qu’ils ont par rapport aux diamants est plus de l’ordre de la perception… le fait qu’il s’agisse d’un produit que les générations précédentes utilisaient de façon rituelle.
Et la génération Y ne croit pas aux rituels ?
Ils créent leurs propres rituels mais refusent ceux qui semblent être là parce que la société l’exige. Ils trouvent une autre manière de faire.
Prenez le mariage. Ce n’est pas qu’ils soient contre. Ils retardent l’âge de se marier car ils veulent se connaître parfaitement avant de franchir le pas. Ils ont trop souvent assisté à des mariages ratés et ils ne veulent pas suivre le même chemin. Ils sont donc plus prudents et plus précautionneux mais ne le rejettent pas en bloc.
Lorsqu’ils comprennent le rôle que le diamant peut jouer en tant que symbole d’une émotion véritable, le résultat est très puissant. S’ils imaginent simplement le diamant comme une chose qu’il faut avoir parce que c’est ainsi lorsqu’on se marie, le résultat n’est plus aussi puissant.
Lorsque vous tapez le mot « diamants » dans Google, vous trouvez de nombreux articles qui prétendent que les diamants ne sont pas rares. Avez-vous hésité avant d’utiliser le mot « rare » dans la campagne de la DPA, de crainte que cela ne déclenche une nouvelle vague d’arguments de ce type ?
Non, cela n’a jamais été un problème dans nos enquêtes auprès des consommateurs. Les gens comprennent parfaitement que les diamants sont un produit naturel, précieux, et que, parce qu’ils sont naturels, leur nombre est limité.
Il est intéressant de noter que le concept de rareté est apparu moins souvent en lien avec les diamants qu’en lien avec les relations. Les consommateurs reconnaissent que, dans leur vie, dans un océan de contacts superficiels et infinis, il existe une relation authentique, rare et particulière, une chose précieuse qui doit être célébrée.
Je n’aurais eu aucun problème à répondre à ça (l’argument de la rareté) s’il était apparu. Je ne pense pas que les consommateurs s’en préoccupent. Je pense que c’est une chose qu’ils savent d’instinct, que les diamants sont rares. Ils savent qu’il y en a de rares et qu’il y en a de moins rares, en particulier quand on parle de grosseurs et de qualités. Mais je ne pense pas que ce soit un problème pour les consommateurs aujourd’hui.
La situation politique actuelle aux États-Unis vous fait-elle craindre le déroulement de l’année à venir, en termes de ventes de diamants ?
Ce que nous regardons attentivement en Amérique, c’est l’environnement macro-économique. Bien que ce ne soit pas… la plus stable des reprises, les bases sont assez solides chez les groupes de consommateurs qui achètent des diamants. L’Amérique a toutes les cartes en mains pour continuer à obtenir des résultats satisfaisants.
Au final, si la campagne des élections a un effet négatif sur le cadre macro-économique, cela ne va pas nous aider. En revanche, les années d’élections ne sont généralement pas mauvaises pour les achats de diamants.
L’essentiel, c’est d’observer la croissance du PIB et les dépenses des consommateurs. Jusqu’à présent, elles se sont bien maintenues au premier semestre. Il n’y a pas de raison particulière que cela ne continue pas ainsi.
Vous avez dit que les bases chez les groupes de consommateurs qui achètent des diamants sont assez solides. Les inégalités de revenus vous inquiètent-elles, craignez-vous de perdre des acheteurs de diamants dans la classe moyenne ?
Oui, un peu. Quand on regarde les précédentes crises économiques, ce sont ces groupes que l’industrie a perdus. Nous avons perdu des quantités importantes de ventes unitaires à l’extrémité basse du marché car ces groupes de population ont été touchés bien plus durement. Et je pense que ce n’est pas bon pour l’universalité des diamants, qui a toujours été au cœur du marketing de la De Beers : il y a un diamant pour chaque revenu, ils sont tous beaux et tout le monde devrait avoir l’occasion de vivre ce bonheur.
Alors bien sûr, (l’inégalité des revenus), cela nous concerne.
Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez ajouter à propos de la campagne de la DPA ?
Seulement que je pense qu’une partie des informations que j’ai lues dans les médias ont l’air de dire : « A Diamond is Forever est en train d’être remplacé ».Or, je n’ai jamais vu la situation sous cet angle. Je pense que l’essentiel, pour nous, De Beers, c’est d’utiliser ces différents outils de manière efficace. (« A Diamond is Forever » est la propriété intellectuelle de De Beers Group et la De Beers l’utilise pour sa marque de diamants, Forevermark, et De Beers Diamond Jewellers, sa chaîne de boutiques de détail.)
Nous avons découvert que la combinaison de ces deux éléments sera frappante pour le consommateur. Le concept d’intemporalité est toujours puissant. L’une des choses qui rendent les diamants si particuliers, c’est qu’ils ont cette capacité à transcender le temps, les générations et les relations.
L’avantage d’avoir désormais un second outil à disposition (« Real is Rare »), c’est qu’il permet à la DPA d’avancer sur cet autre aspect vraiment important des diamants : l’authenticité. La combinaison entre intemporalité et authenticité est très puissante.
Ce n’est pas la fin de quelque chose, c’est le début d’autre chose. C’est l’ajout d’une autre réflexion importante.
Photo © Tacori