Tiffany & Co. a engagé des discussions avec les principaux dirigeants d’Apple il y a quelques mois, a expliqué Frédéric Cumenal, le PDG de la marque, au cours d’une présentation de montres connectées lors de la conférence Global Retailing chez Goldman Sachs, le 10 septembre.[:]
« Il y a quelques mois, nous avions organisé des pourparlers avec quelques-uns des principaux dirigeants d’Apple », a expliqué M. Cumenal, sans en dire plus. Un porte-parole de Tiffany a refusé d’apporter davantage d’explications et un porte-parole d’Apple n’a pas répondu à notre demande d’interview. Au mois d’août, le new-yorkais London Jewelers a commencé à vendre l’Édition or 18k, le modèle le plus haut-de-gamme d’Apple Watch. Le joaillier a ainsi été le seul aux États-Unis à proposer la montre.
Frédéric Cumenal a ajouté que des initiatives du style de l’Apple Watch pouvaient stimuler la catégorie dans son ensemble, car elles réconcilient les jeunes avec les montres.
« Lorsque l’on regarde la jeune génération, les 20-25 ans, on remarque que beaucoup ne portent plus de montres, a-t-il déclaré. Je pense que c’est une formidable opportunité pour nous de profiter de ces [initiatives] et de ramener le regard sur le poignet. »
Quel que soit l’avenir des montres connectées, Frédéric Cumenal semblait très enthousiaste face à la nouvelle gamme de montres de la société, affirmant que les premiers résultats sont bons. La société va toutefois modifier son approche marketing afin de cibler les acheteurs masculins.
« Nous n’avons pas bâti de relations solides avec les hommes, a-t-il affirmé. Ils sont pourtant essentiels dans la décision d’achat de montres. Même lorsqu’il s’agit d’une montre pour femmes, il est très important que les hommes donnent leur aval. »
« Nous sommes entrés sur le marché des montres pour y rester, a-t-il ajouté. Mais il faudra des années pour que nous soyons bien implantés. »
Frédéric Cumenal s’est également exprimé sur les sujets suivants :
– Malgré la solidité relative de l’économie américaine, Tiffany a noté que ses ventes étaient irrégulières, bien qu’en augmentation. Il a ajouté que le second semestre aux États-Unis se présentait mieux que le premier.
– La société porte un regard très sévère sur son portefeuille de boutiques et envisage des déménagements et des fermetures.
« Nous allons prendre des décisions drastiques concernant les fermetures de nos boutiques, a-t-il expliqué. Cette année, nous en avons déjà fermé deux, ce n’est pas beaucoup, mais c’est significatif. »
– La société repense la décoration de certaines boutiques pour leur assurer « un environnement beaucoup plus propre, plus adapté et plus chaleureux ; elle insiste également pour rendre les échanges plus chaleureux dans les boutiques.
« Nous voulons que nos [vendeurs] se montrent plus performants quand il s’agit de raconter l’histoire de la marque, qu’ils soient mieux à même de faire passer les messages concernant notre héritage, a-t-il ajouté. Nous voulons renforcer le côté chaleureux de la marque, un facteur de différenciation essentiel dans le monde du luxe, qui a tendance à se refroidir quelque peu. »
Il a ajouté que la société met aujourd’hui l’accent sur la fidélisation de la clientèle.
« Aux États-Unis, nous étions une sorte de société du luxe axée sur les ventes, a-t-il ajouté. Nos vendeurs avaient peut-être tendance à se montrer un peu passifs et à viser les ventes [au lieu de] créer une véritable relation avec nos clients, de mieux les connaître, de mieux comprendre leurs intentions et ce qu’ils recherchent. »
– La marque veut également mieux connaître ceux qui se rendent dans ses boutiques.
« Il y a quelques années, nous n’étions nulle part, a-t-il expliqué. Il nous faudra des années, mais chaque mois, nous constatons des progrès. »
– La marque ne considère pas qu’elle sait tout du consommateur américain.
« Étant donné notre relation de longue date avec le consommateur américain, de temps à autre, nous [avons imaginé, à tort], que le consommateur américain savait tout de notre histoire, qu’il connaissait nos origines, a-t-il déclaré. Nous réalisons que ce n’est pas toujours le cas. »
– Il considère qu’il existe une opportunité avec les pierres de couleur.
« Nous avons la possibilité d’intégrer notre propre spécificité dans le monde des pierres de couleur, a-t-il ajouté. Mais nous ne le ferons qu’en respectant parfaitement notre politique de RSE [responsabilité sociale de l’entreprise]. Certaines pierres de couleur sont assez difficiles à trouver dans de bonnes conditions – et par bonnes conditions, j’entends la certitude que tout est fait correctement, en termes de main-d’œuvre, de conditions sociales et d’environnement. Cela nous a donc empêché de [nous lancer] en grand. Mais nous travaillons sur quelques collections et programmes qui vont renforcer la présence des pierres de couleur, non pas avec une approche classique, mais y en apportant notre propre style. »
– La marque développe un produit unique pour contrebalancer les ventes en baisse de ses créations en argent.
« Il faut que les consommateurs soient enthousiasmés, même par les [produits d’entrée de gamme], a-t-il expliqué. Nous ne proposions aucune création de haut niveau. Il s’agissait de simples pièces d’argent. Nous considérons qu’avec le nom Tiffany, nous n’avons pas le droit de proposer une offre réduite à nos clients. »
Photo : montres Tiffany & Co.