Rappelez-vous des titres de ces derniers jours : The Botswana Gazette : Crise diamantaire à l’horizon ?, Financial Times : Les tailleurs indiens perdent de leur éclat, Business Insider : Le signal d’alarme lancé par la capitale diamantaire mondiale.[:]
Prenez maintenant ceux-ci, de la même période : Euronews : Nouvel éclat pour les ventes mondiales de diamants, Hindu Business Line : « Nous voyons de formidables opportunités en Inde et en Chine », Mining Weekly : Demande mondiale record pour les bijoux en diamants, avec 81 milliards de dollars.
Le second groupe de titres provient de la De Beers, le premier d’échanges d’opinions au sein du marché.
Ces deux séries de titres ne sont pas nécessairement contradictoires : les ventes de diamants sont globalement en hausse, même si tout le monde n’en a pas l’impression. La juxtaposition est éloquente. À une époque où le reste du marché titube et a peur, la De Beers continue d’agir comme si l’industrie profitait d’un essor sans précédent. Elle répond aux préoccupations du marché par des platitudes peu convaincantes. « Attendez simplement le Nouvel An chinois, nous dit-on, ou la Saint-Valentin ou le salon de Hong Kong ou Baselworld … » Et pourtant, tous ces événements ont été décevants et le moral continue de plonger.
Dans l’un de ses premiers discours en tant que PDG de la De Beers, Philippe Mellier a affirmé qu’il voulait voir sa société prendre davantage le « rôle de leader ». Alors, ne fait-il pas ce que fait tout bon leader : inspirer les autres et se montrer positif ?
Pas nécessairement. Pendant une crise – et il semblerait bien que nous en vivions une actuellement – les leaders doivent faire preuve d’empathie. Ils doivent montrer qu’ils comprennent ce que les personnes traversent. Bien sûr, il est important de rester positif et optimiste, d’affirmer que « nous allons sortir de cette mauvaise passe. » Mais les messages doivent avoir une certaine corrélation avec la réalité, faute de quoi personne ne les écoutera. Ils doivent souligner que tout le monde est face aux mêmes difficultés, au même moment.
Or, l’industrie n’est pas soudée pour affronter ces problèmes. Pendant que la majeure partie des professionnels souffre, la De Beers sort tout juste d’une année formidable. Et la nouvelle direction a clairement adopté une approche plus intransigeante de la relation entre la De Beers et le reste de l’industrie. Cela ne se retrouve pas seulement dans les commentaires du PDG Philippe Mellier au JCK, la société est également réticente à utiliser les qualificatifs traditionnels, comme « partenaires sightholders ».
Bien entendu, d’aucuns pourraient affirmer que ces mots n’ont jamais rien signifié de concret. Mais même ainsi, leur absence en dit long sur la situation.
La De Beers finira par être touchée. La société a tenté d’écouler un gros sight en mars : résultat, 30 % à 40 % ont été refusés. Cela montre, une fois de plus, un décalage fort et troublant entre le minier et le marché.
L’industrie a besoin d’un leader, mais pas comme cela s’entendait au temps des cartels. Elle doit sentir que la De Beers et les autres producteurs comprennent ce qui se passe, qu’ils s’en préoccupent et qu’ils font ce qui est en leur pouvoir pour faire cesser cette spirale. Certes, le marché a besoin qu’on lui regonfle le moral. Mais, plus que tout, il a besoin de savoir que ceux qui sont en haut de la chaîne se soucient de lui.