Les États-Unis devraient renforcer leur domination sur l’industrie diamantaire en 2015. Avec un inversement des tendances qui ont marqué l’industrie ces dernières années, l’accent semble repasser de l’est à l’ouest. [:]L’essor est désormais soutenu par la stabilité des États-Unis.
L’année dernière n’a pas vraiment été exceptionnelle pour le marché. Les marges bénéficiaires se sont réduites et les prix du taillé ont chuté. L’indice RapNet (RAPI™) pour les diamants de 1 carat certifiés en laboratoire a perdu 8,7 % en 2014 (voir le rapport mensuel de Rapaport de janvier 2015, publié récemment). On frémit en imaginant la dégringolade des prix du taillé si la demande américaine n’avait pas atteint ce niveau.
Les tendances du marché diamantaire en 2014 ont donc été davantage influencées par le ralentissement de la Chine. Les joailliers de ce pays s’étaient constitué des stocks, espérant une croissance rapide qui ne s’est pas concrétisée. Un sondage de Reuters, mené auprès de 31 économistes et publié au cours de la semaine du 5 janvier, a suggéré que le produit intérieur brut (PIB) de la Chine pourrait progresser de 7,2 % au quatrième trimestre 2014, autrement dit à son rythme le plus lent depuis le premier trimestre 2009.
Et même si la plupart des pays ne peuvent que rêver d’une croissance de 7 %, il faut replacer ces chiffres dans le contexte de la croissance à deux chiffres de ces dix dernières années. Ce repli était inévitable : la Chine passe par une phase de transition nécessaire à mesure que son économie devient mature. Le gouvernement de Xi Jinping a entrepris de transformer l’économie, passant d’un système entraîné par la consommation à un système stimulé par les investissements du gouvernement et des projets d’infrastructures.
Le ralentissement inévitable au cours de cette transition a entraîné une indigestion au sein des industries de consommation, comme le marché des diamants et des bijoux – et certainement au sein du secteur commercial –, situation qui devrait perdurer tout au long de 2015. La campagne anticorruption du gouvernement, qui vise à limiter les manifestations excessives de luxe et la consommation ostentatoire, continue aussi de nuire à la demande pour les produits de luxe.
La croissance ralentit également en Inde depuis deux ans, bien que les choses s’améliorent. L’humeur est au beau fixe depuis l’élection en mai de Narendra Modi au poste de Premier ministre. Quant aux autres régions, l’Europe continue d’affronter un chômage important et le Japon se débat pour maintenir une dynamique économique.
[two_third]Le marché diamantaire a donc les yeux rivés vers les États-Unis, en quête de soutien. En effet, la plupart des indicateurs économiques y sont positifs. Selon le dernier rapport du gouvernement, le PIB a pris 5 % au troisième trimestre 2014, autrement dit son rythme le plus rapide depuis 11 ans. Une première estimation des données du quatrième trimestre devrait être publiée le 30 janvier mais les prévisions indiquent une croissance d’environ 3 % pour cette période.
Notons surtout que la confiance des consommateurs s’est améliorée en décembre et reste relativement élevée en janvier, le chômage s’étant stabilisé en dessous de 6 %.
[/two_third][one_third_last]
« Le marché diamantaire a donc les yeux rivés vers les États-Unis, en quête de soutien. En effet, la plupart des indicateurs économiques y sont positifs. »
[/one_third_last]
Ceci dit, les commentaires ont été mitigés à l’issue des fêtes de Noël aux États-Unis. Les dernières données en date du département du Commerce ont montré un démarrage positif, les ventes de détail ayant augmenté de 0,7 % en novembre par rapport au mois précédent, son gain le plus fort en huit mois. Les données sur les ventes de détail de décembre devraient être publiées le 14 janvier. Entre-temps, Retail Next, un cabinet d’analyse, a estimé que les ventes en magasin ont perdu jusqu’à 8 % pendant la saison, tandis que les ventes globales pendant les fêtes ont probablement augmenté de 3,5 % à 4 %, renforcées par d’importants achats en ligne.
Les ventes en ligne se sont maintenues en bonne place tout au long de la période des fêtes, dépassant même les attentes optimistes d’avant la saison de Gian Fulgoni, le président du conseil de comScore, un cabinet d’analyse en ligne. comScore a estimé que les ventes de détail en ligne aux États-Unis ont progressé de 15 % en glissement annuel, pour atteindre 53,3 milliards de dollars pendant les fêtes de fin d’année, entre le 1er novembre et le 31 décembre.
Gian Fulgoni a avancé un avis positif pour les ventes de détail aux États-Unis pendant cette période de fêtes.
« Le consommateur américain s’est montré souple et a affirmé son pouvoir en matière de dépenses en ligne cette année, a-t-il expliqué. L’humeur de plus en plus positive chez les consommateurs, l’amélioration des chiffres du chômage et la baisse des prix du gaz se sont associées pour donner un environnement de consommation plus favorable. Les clients ont réagi en ouvrant grands leurs porte-monnaie, plus que jamais depuis la crise financière. »
[two_third]Personne n’a l’impression que les bijoux ont bénéficié du même sursaut que les industries de l’électronique ou de l’habillement. Pourtant, les détaillants qui se sont entretenus avec Rapaport News en décembre ont affirmé avoir constaté des augmentations en glissement annuel de près de 9 %. Beaucoup ont remarqué que les bijoux abordables et les pièces très haut-de-gamme se sont bien vendus, tandis que les articles de moyenne gamme n’ont pas été à la hauteur des attentes, notamment pour les boucles d’oreilles avec un solitaire en diamant et les pierres de 1 carat.[/two_third][one_third_last]
« Beaucoup ont remarqué que les bijoux abordables et les pièces très haut-de-gamme se sont bien vendus. »
[/one_third_last]
En effet, Signet Jewelers, le plus gros détaillant de bijoux aux États-Unis, qui détient les marques Kay Jewelers, Jareds et Zale, a indiqué que ses ventes en magasins comparables pendant les vacances, entre novembre et décembre, n’ont augmenté que de 3,6 %, avec une croissance entraînée par sa division britannique. Parallèlement, ses ventes en ligne ont bondi de 20 % sur une base comparable. Tiffany & Co., autre baromètre de l’industrie, devrait annoncer ses chiffres après que nous mettions sous presse, le lundi 12 janvier.
Pourtant, les achats de bijoux ont probablement été stimulés par les consommateurs américains, qui ont senti du mieux en matière de richesses et de confiance dans l’avenir. En 2014, les marchés d’actions sont montés en flèche, la moyenne industrielle du Dow Jones dépassant le plafond des 18 000 points pour la première fois en décembre. En outre, la baisse des prix du pétrole devrait, du moins en théorie, entraîner une hausse des fonds disponibles pour les dépenses discrétionnaires. De même, un dollar plus fort devrait faire augmenter les revenus disponibles des ménages américains.
En effet, les revenus disponibles effectifs, autrement dit le pouvoir d’achat des ménages, devraient avoir augmenté de près de 3 % en 2014, après une chute de 0,2 % en 2013.
La réserve fédérale a indiqué, dans un compte-rendu de sa réunion de décembre, publié au cours de la semaine du 5 janvier, que la baisse des prix de l’énergie devrait stimuler les dépenses aux États-Unis. « [Des prix du pétrole en baisse] sont certainement une bonne chose pour les familles, pour les ménages, a indiqué Janet Yellen, la présidente de la Fed. Cela leur laisse plus d’argent à disposition. »
Bien entendu, certains facteurs peuvent susciter des inquiétudes vis-à-vis de 2015. La Fed a averti que la faiblesse de l’économie mondiale pourrait encore nuire à la croissance américaine. La Fed devrait aussi commencer à augmenter les taux d’intérêt à partir de juin. Cela devrait induire une hausse des prix et, sans doute, des emprunts plus chers pour les ménages de la classe moyenne.
Quoi qu’il en soit, ayant plus d’argent à dépenser, les consommateurs américains semblent en meilleure posture que jamais. Reste au marché à attirer ces dollars jusque dans les joailleries (ou sur les sites Web). Cela devrait offrir aux diamantaires l’espoir que cette possible croissance suffira pour porter l’industrie mondiale, face à d’autres marchés qui s’affaiblissent. Pour le moins, les États-Unis leur offriront la stabilité à laquelle ils aspirent. Ce faisant, le pays devrait renforcer sa position de marché dominant dans l’industrie diamantaire en 2015.