La 36ème édition du World Diamond Congress bisannuel, qui s’est tenue au cours de la semaine du 16 juin à Anvers, a permis aux dirigeants de l’industrie de s’attaquer aux problèmes les plus urgents du secteur.[:] Certes, la majeure partie des discussions s’est focalisée sur le rapport d’activité plutôt que sur la création de politiques, mais la discussion en soi est un objectif final tout à fait louable. L’ambiance dans les assemblées annuelles respectives de la World Federation of Diamond Bourses (WFDB) et de l’International Diamond Manufacturers Association (IDMA), qui constituent le congrès, a donc été positive.
Au départ, la liste des participants était aussi éloquente que l’ordre du jour. Composée de délégations de haut niveau en provenance des pays miniers, elle comptait notamment deux ministres africains. Anvers a également accueilli des représentants du Gokhran, l’agence de dépôt de l’État russe, qui est généralement très discrète.
L’événement a permis au pays organisateur, la Belgique, de raffermir sa position au rang des principaux centres d’échange de brut. Dans ce qui restera vraisemblablement le commentaire le plus significatif de la séance d’ouverture, Kris Peeters, le ministre-président de la Flandre, a affirmé que la Belgique ne soutiendrait pas les sanctions économiques qui pourraient toucher l’industrie.
[two_third]Les centres de négoce sont clairement déterminés à garantir l’offre de brut. La concurrence pour se procurer du brut est plus saine que jamais – à la fois parmi les fabricants et les négociants et entre les bourses qui les desservent. Adressant également son message au secteur de l’extraction minière, Maxim Shkadov, le président de l’IDMA, a ouvert le congrès par un plaidoyer pour la survie du secteur de la fabrication. Une fois le ton donné, l’absence de rentabilité des fabricants a été un thème récurrent au cours des trois jours de la rencontre.[/two_third][one_third_last]
« Les centres de négoce sont clairement déterminés à garantir l’offre de brut. »
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Ernie Blom qui, à cette occasion, a été réélu pour deux ans à la tête de la WFDB, a souligné trois défis qui ont dominé les discussions. L’absence de rentabilité venait en première position. Il a ensuite souligné la nécessité de se rapprocher des banques pour garantir une approche responsable du financement, qui soutienne toute la chaîne d’approvisionnement. Ernie Blom a enfin fait remarquer que l’industrie est mise en difficulté par « des initiatives lancées sans sa participation ». En cela, il faisait référence au Precious Stones Multi-Stakeholder Working Group (MSWG), qui s’est récemment réuni à Paris.
Le congrès a également été informé de l’actualité des questions relatives aux diamants synthétiques non déclarés qui entrent sur le marché, aux violations des droits de l’homme qui touchent les mineurs non déclarés et aux initiatives de « découverte du client », dont le but est de s’attaquer aux problèmes de blanchiment d’argent. Les avancées de la World Diamond Mark ont également été présentées. Lors du congrès, des représentants du programme se sont accordés pour lancer l’initiative de marketing générique en Turquie plus tard dans l’année, puis ultérieurement à Dubaï.
L’IDMA et la WFDB ont, pour le moins, considéré la World Diamond Mark comme un effort bien intentionné pour stimuler la demande de diamants et améliorer la rentabilité de l’industrie, malgré certaines critiques voilées lors des discussions. Les représentants de l’IDMA ont remis en question le fait que la Turquie soit le bon marché pilote pour la campagne, étant donné les nombreux négoces « non officiels » qui ont cours dans le pays. Pourtant, ils ont apporté leur soutien au programme.
Certaines questions étaient plus litigieuses que d’autres ; le soutien de l’industrie, ou son absence, au MSWG (Precious Stones Multi-Stakeholder Working Group) n’était pas la moindre. Le MSWG est une initiative engagée principalement par les joailliers américains et des organisations non gouvernementales, afin de développer des directives pour que les échanges de pierres précieuses ne financent pas les conflits et ne soient pas associés à la violence ou à des abus des droits de l’homme.
Lors des assemblées du World Diamond Congress, les discussions ont largement évoqué l’absence apparente d’engagement du MSWG envers le marché. « Nous sommes également confrontés au lancement de processus mal conçus, initiés par des groupes qui ne tiennent pas compte des grands acteurs, comme la WFDB, ou d’autres organes de l’industrie, ni même des pays producteurs en Afrique, a expliqué Ernie Blom. Nous craignons que ces projets soient poussés par des intervenants ayant leur propre programme. »
Suite à la réunion du MSWG à Paris en mai 2014, le groupe a admis qu’il devait davantage rayonner pour attirer la plus large participation possible aux discussions. Pourtant, le congrès a peut-être bien raté l’occasion d’organiser des discussions d’importance ; il aurait ainsi fallu fixer les points que les directives de la WFDB et de l’IDMA devaient soutenir au cours de leur implication future dans le MSWG.
Ernie Blom s’est engagé à mieux anticiper pour fixer l’ordre du jour du MSWG. Quant au tout nouveau Forum des Présidents – composé des présidents de la World Jewellery Confederation (CIBJO), de la WFDB, de l’IDMA et du World Diamond Council (WDC) –, il a prévu de s’investir auprès du MSWG.
[two_third]Le World Diamond Congress aurait eu intérêt à se prononcer sur l’approche à adopter face aux directives de vérification des fournisseurs. Le maintien de l’intégrité des capacités d’approvisionnement de l’industrie est en effet une question urgente à régler. Rappelons-le, ce forum n’était peut-être pas l’endroit idéal pour fixer une politique. Au lieu de cela, le World Diamond Congress paraît être une plate-forme idoine pour établir le programme de l’année à venir et la priorité semble donnée à une coopération avec le MSWG.
On pourrait craindre que l’industrie enterre l’initiative, sans lui donner sa chance, car le marché dirige généralement ses efforts politiques vers l’extraction minière plutôt que vers le secteur du détail. Nous aurions aimé que certains observateurs de la vente de bijoux soient présents au congrès, comme pour le secteur minier, qui était fort bien représenté. Peut-être faudrait-il passer d’un approvisionnement agressif du brut vers une stimulation dynamique de la demande de détail, pour atténuer les difficultés de rentabilité des fabricants.[/two_third][one_third_last]
« Le congrès a peut-être bien raté l’occasion d’organiser des discussions d’importance […].Le maintien de l’intégrité des capacités d’approvisionnement de l’industrie est en effet une question urgente à régler. »
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Bien sûr, il existe des sensibilités politiques. Par nature, la WFDB tente de maintenir un équilibre fragile, étant donné qu’elle représente 30 bourses de 28 pays, aussi divers que le Canada et la Corée du Sud, les deux nouveaux arrivants. L’IDMA a évidemment un mandat plus limité.
Certes, il peut exister des différends entre les bourses sur la façon d’aborder ces défis. De même, des désaccords pourraient naître entre les centres de fabrication concernant certaines questions. Après tout, chaque bourse, comme chaque association, possède son propre programme et ses propres intérêts. Sachant cela, même s’il était clair que le World Diamond Congress, organisé sur trois jours, n’allait pas résoudre tous les problèmes de l’industrie, il est au moins parvenu à définir ses problèmes fondamentaux. Pourtant, sans aucun doute, les véritables défis restent à venir.