En Chine, «l’Année du Dragon» en cours semble avoir perdu de son feu, les investisseurs et les analystes envisageant l’économie de la Chine avec de plus en plus de prudence. Les acheteurs de diamants chinois ont pris conscience de ce sentiment et s’abstiennent de faire des achats de stocks importants tandis que l’incertitude économique mondiale s’amplifie et la confiance des consommateurs chinois recule.[:]
Bien que la croissance économique de la Chine demeure enviable en vertu des normes de tout autre pays – attendue à près de 8 pour cent en 2012 le développement économique se poursuit à un rythme ralenti.
La croissance économique de la Chine a progressé de 8,1 pour cent au premier trimestre 2012, son plus faible rythme trimestriel en trois ans. Pour le second trimestre, les données, dont la publication est prévue pour la semaine prochaine, devraient être plus faibles à environ 7,6 pour cent.
La croissance rapide observée ces dernières années ne pouvant être maintenue à long terme, ce ralentissement était inéluctable. Il fait aussi partie intégrante d’un processus de développement, le pays passant d’un marché largement exportateur à un marché largement dominé par la consommation. La Chine se détourne de plus en plus de l’offre pour s’orienter vers la demande.
Dans un rapport datant d’avril 2012, la Banque mondiale suggère que le défi auquel fait face le gouvernement dans l’immédiat est donc de « faciliter un atterrissage en douceur », et de s’assurer que la croissance ne ralentisse pas trop rapidement. Le gouvernement doit équilibrer sa politique fiscale afin de soutenir et d’encourager la consommation locale pendant qu’il tente de réduire l’inflation et de maîtriser les secteurs de l’immobilier et de l’infrastructure qui sont en état de surchauffe.
Il ne peut guère faire plus. L’économie du pays est influencée par des facteurs tant intérieurs qu’extérieurs. Le rythme de croissance du premier trimestre a beaucoup ralenti car ses exportations ont été réduites suite à une plus faible demande mondiale pour ses produits, une retombée de la crise européenne persistante et de la lente reprise aux États-Unis. La consommation chinoise locale ainsi que la confiance des consommateurs se sont relativement maintenues durant le trimestre.
Ceci a changé au second trimestre, ces tendances mondiales ayant davantage mis en garde les consommateurs chinois. Des exportations plus faibles ont influencé la production et les consommateurs ont été réceptifs aux signaux. Les données qui seront publiées la semaine prochaine devraient indiquer une croissance commerciale plus lente au second trimestre, laquelle a fini par avoir une incidence sur le segment des bijoux en diamants.
Le sentiment de faiblesse a certainement été ressenti sur le marché du diamant, la demande mondiale ayant ralenti au mois de juin selon le rapport de recherche de Rapaport publié cette semaine et intitulé Price Pressures (Pression sur les prix). La baisse est survenue car les acheteurs de la Chine continentale et de Hong-Kong se sont gardés de faire des achats de stocks importants, s’attendant à ce que les prix s’affaissent davantage en raison du faible environnement économique.
Le récent June Hong Kong Jewellery & Gem Fair (Salon de la joaillerie et des pierres précieuses de Hong-Kong – juin 2012) a reflété une faible demande de l’Extrême-Orient pour les diamants. Les exposants ont constaté que la confiance des consommateurs est en baisse étant donné que les acteurs des secteurs de détail et du privé ont des doutes sur l’économie. Pour les consommateurs chinois, les diamants fantaisie et de pureté moindre deviennent de plus en plus un moyen de rester dans les limites de leurs modestes budgets.
Henry Cheng, président du géant de la joaillerie Chow Tai Fook basé à Hong-Kong, donne une analyse similaire. Selon Bloomberg, le 27 juin, Cheng aurait déclaré que « le sentiment dans le secteur de détail s’est affaibli ces derniers mois, les consommateurs devenant de plus en plus prudents en raison de l’incertitude économique. Ceci se traduit par une dépense plus faible pour chaque client par transaction, mais étant donné que la classe moyenne en Chine est en croissance, ceci aide à stimuler le total des ventes. »
Malgré la baisse des dépenses individuelles, des sociétés similaires à Chow Tai Fook et d’autres grandes chaînes de bijouterie au détail comptent sur cette classe moyenne croissante pour maintenir l’augmentation de leurs ventes. Leur expansion agressive à travers la Chine en témoigne.
Les chiffres ne cessent donc de tituber. Les revenus de Chow Tai Fook ont augmenté de 61 pour cent annuellement jusqu’à 7,3 milliards de dollars (HKD 56,57 milliards) pour l’année qui s’est terminée le 31 mars 2012. Chow Sang Sang, le second plus grand joaillier de la région, a vu ses revenus augmenter de 47 pour cent jusqu’à 2,21milliards de dollars (HKD 17,16 milliards) en 2011. De même, les joailliers mondiaux se tournent vers cette région pour éperonner la croissance. Les ventes de Tiffany & Co en Asie Pacifique ont augmenté de 17 pour cent au premier trimestre, distançant considérablement sa croissance plutôt déprimée dans d’autres régions.
D’autres produits de luxe ont aussi connu une expansion remarquable en Chine et se développent en conséquence. Gucci a augmenté sa présence en Chine en passant de tout juste 4 magasins en 2004 à 46 magasins à travers 32 villes en 2011. La marque de luxe envisage d’ouvrir 10 magasins de plus en Chine cette année. BMW et Audi ont déclaré cette semaine que leurs ventes globales de voitures respectives sont poussées par la classe moyenne en Chine. Les ventes de BMW en Chine ont connu une augmentation annuelle de 32 pour cent en mai tandis que celles d’Audi ont augmenté de 44 pour cent durant ce mois. Les sociétés ont toutes deux constaté qu’il n’y avait aucun signe de ralentissement de la demande chinoise dans leur secteur.
La tendance renforce les fortes perspectives pour la demande sur le long terme, la classe moyenne en Chine n’ayant pas encore culminé et son potentiel commercial demeurant relativement inexploité.
Cependant, la demande reste vulnérable aux risques à court terme et aux contretemps économiques, ce qui est actuellement évident sur le marché du diamant. Le sentiment restera bas car les consommateurs chinois ont à s’adapter à des niveaux de croissance plus faibles, et il faudra au moins tout le reste de l’année pour qu’ils retrouvent leur entrain d’antan.
Cependant, les dépenses des consommateurs finiront par reprendre du poil de la bête étant donné que la Chine est encore loin d’être un marché arrivé à maturité et la demande de diamants sera poussée par les marchés émergents de l’Extrême-Orient à moyen et long terme. Bien que « l’Année du Dragon » de la Chine n’ait pas tracé le chemin flamboyant des années précédentes, le pays n’a certainement pas perdu de son étincelle.