Le secteur du brut est en difficulté et les raisons ne manquent pas : faiblesse de la demande, coûts élevés, hausse des stocks, faiblesse des prix du taillé, faibles liquidités… stop, n’en jetez plus. Ceux qui évoluent dans ce secteur aussi sont pessimistes. Tant et si bien qu’ils s’excusent pour leurs affirmations de mauvais augure.
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« Le marché est mort », « l’humeur est maussade », « ça va empirer », « le marché du diamant ? quel marché ? », c’est ce que l’on pouvait entendre de la bouche des négociants de brut, des sightholders, des courtiers et des fabricants cette semaine. Tous ont évoqué des perspectives négatives et une humeur morose.
Au début du sight de la DTC de la semaine dernière, par exemple, les négociants étaient inquiets. Une question les hantait : « Sauront-ils faire baisser les prix ? »
Et ce n’est pas comme si les sightholders avaient tout laissé faire à la De Beers. Nous l’annoncions la semaine dernière, ils ont la possibilité de reporter la livraison de marchandises, de modifier leur calendrier de demande initial (ITO, intention de vendre), et c’est ce qu’ils ont fait avant le sight de juin.
Les sightholders peuvent également demander des marchandises en plus de leur ITO (qui soient extérieures à leur programme), mais ils s’en sont abstenus en raison de la faiblesse de la demande. Raison de plus pour que le volume de marchandises du sight de juin diminue encore.
Une troisième option, que les sightholders ont appliquée cette fois-ci, consiste à laisser des marchandises sur la table. Nous comprenons que beaucoup aient refusé de nombreuses boîtes. Selon une estimation, cela concernerait jusqu’à 15 %, voire 20 % (!) des pierres.
Toutes ces situations ont fait baisser l’approvisionnement du marché, le sight étant estimé à 500 millions de dollars grand maximum. Devrait-on y voir un message adressé par les sightholders à Philippe Mellier, le PDG de la De Beers ?
De nombreux sightholders critiquent à voix basse (et micros fermés) aussi bien M. Mellier que le nouveau style de la direction. La philosophie sous-jacente, qui consiste à « vendre autant que possible, au prix maximum » est considérée comme une stratégie imprudente. De nombreux sightholders n’oseront pas dire qu’ils ont besoin de moins de marchandises. Ils n’oseront pas non plus avouer à la DTC qu’ils ne peuvent pas se les payer.
Animés d’un ressentiment croissant face au refus perçu de la DTC de reconnaître les difficultés liées à la crise économique, les sightholders proposent les marchandises sur le marché secondaire, qui n’en a pas non plus besoin.
La position des sightholders étant bien connue, les offres pour les boîtes sont inférieures au tarif de la DTC, parfois jusqu’à 10 % ou 15 % de moins. Et les sightholders vendent… à perte. Il ne s’agit pas d’une perte de 15 %, mais même à 8 % en dessous du tarif, et déduction faite des frais et honoraires des courtiers, la perte réelle peut atteindre 11 %.
Selon un sightholder, on connaîtrait même un sentiment de panique pour certaines marchandises. En effet, une boîte vendue à très bas prix crée un précédent tarifaire sur le marché.
Les sightholders vendent toutefois les marchandises à perte, principalement pour générer du chiffre d’affaires.
Il faut ajouter que la De Beers ne dispose pas toujours des marchandises qu’elle est censée proposer selon les ITO. Par conséquent, de nombreuses boîtes n’étaient pas disponibles. En tout, ce sont environ 40 boîtes, y compris toute la sélection des Crystals et des fantaisies, qui n’ont apparemment pas été proposées au sight de juin.
Diverses causes à la situation actuelle
Le début de l’été est généralement une période plus calme. Après l’envolée des prix de l’an dernier, alimentée par les nouvelles boutiques qui ont constitué leur stock (principalement en Chine) et par les boutiques de bijoux en or qui ont commencé à proposer des bijoux en diamants (principalement en Inde), l’accalmie de cette année est également due aux détaillants. Constatant que les prix du taillé sont en baisse, ils retardent leurs achats.
Le ralentissement en Europe, l’amélioration vacillante aux États-Unis, les préoccupations liées à la baisse des achats des consommateurs en Chine et un financement difficile en Inde contribuent à la situation actuelle. Toutefois, les consommateurs en Chine et en Inde continuent d’acheter des bijoux en diamants.
D’où un regain d’espoir que la situation évolue dès que les détaillants seront obligés de reconstituer leurs stocks.
Prix
Dans certains domaines, la DTC a augmenté les prix. Cela concernait les Colored Sawables 3 gr / +7 en hausse de 3,1 % et les Preparers Low de 2 à 10 ct, en hausse de 8 %, bien que les assortiments ne soient pas mieux dotés. Dans le cas de la boîte de Preparers, la demande était faible, d’où l’incongruité de la hausse des prix. Les Round Makeables de 4 à 8 gr, dans un assortiment amélioré, étaient en hausse de 4,7 % à 1 270 dollars.
Dans de nombreux autres domaines, les prix ont diminué. Les Fine Sawables de 4 à 8 gr étaient en baisse de 6,5 % à 1 029 dollars. Certains Makeables de 2,5 à 4 ct étaient en baisse de 4,1 % à 1 554 dollars.
Bien que le nombre de boîtes à avoir vu leurs prix baisser a augmenté, tout le monde s’accorde à dire que les prix restent encore très élevés. Ils sont trop importants pour fabriquer, vu le prix actuel du taillé, et l’offre est trop élevée sur le marché secondaire pour faire des bénéfices.
Alrosa, qui vient d’annoncer une amélioration de ses revenus (+ 4 %) et de ses bénéfices (+ 8 %) au premier trimestre, a récemment baissé ses prix de 3 % en moyenne. Le prix des smalls de bonne qualité aurait été réduit de 10 %.
Chez BHP Billiton, les prix ont principalement diminué pour les 2,5 ct ainsi que pour les plus grosses marchandises, perdant jusqu’à 10 %. Les deux exceptions ont concerné les ZMC BRN de 2,5 à 10 ct et les CL/Lo-White de 2,5 à 10 ct, qui ont augmenté de 3,5 % et 4,5 % respectivement.
Perspectives
Les perspectives sont médiocres pour l’instant et à court terme. Si le salon de Hong Kong, qui s’est ouvert aujourd’hui, est un succès (contrairement aux attentes des négociants), un retournement de situation est proche.
Des attentes plus réalistes prévoient que les affaires ne vont pas s’améliorer avant septembre.